Messages les plus consultés

Affichage des articles dont le libellé est fibre optique. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est fibre optique. Afficher tous les articles

lundi 9 janvier 2012

Déploiement de la fibre optique : un projet qui se prépare et qui doit être géré dans la durée

Le déploiement de la fibre optique dans les immeubles d’habitation (FttH) est un projet complexe qui suscite trop souvent des frustrations, des malentendus, voire des conflits entre les (co)propriétaires et les opérateurs d’immeuble. Or, une grande partie de ces problèmes pourraient être évités si le déploiement de la fibre était, d’une part géré en amont comme un véritable projet par les propriétaires, d’autre part géré pendant la durée de l’installation et au-delà, pendant la poursuite de la convention, pour s’assurer de sa bonne exécution.


1. La préparation du projet de déploiement de la fibre optique : cahier des charges et sélection de l’opérateur d’immeuble

Un projet de déploiement de fibre ne peut être entrepris ni à la légère, ni de manière improvisée.

Comme tout projet complexe et technique, il convient au préalable, pour les propriétaires, de prendre connaissance des contraintes techniques et opérationnelles, définir les besoins et/ou identifier les difficultés potentielles, et ce, avant même de sélectionner l’opérateur qui sera en charge de l’installation de la fibre optique dans l’immeuble.

Bien que tout ou partie de ces informations sont collectées par l’opérateur d’immeuble lors de la signature de la convention, il est recommandé aux propriétaires de faire cet exercice de préparation de projet, préalablement à la sélection de l’opérateur d’immeuble et à la signature de la convention, et ce, que les propriétaires soient occupants ou bailleurs.

Les contraintes techniques et opérationnelles
Ces contraintes peuvent varier suivant le type d’immeuble ou de copropriété concerné : immeuble d’habitation ou immeuble mixte (habitation et bureaux), immeuble ancien ou moderne, immeuble de style ou de standing ou non. Le type de propriété peut également avoir un impact dans la préparation du projet : propriétaire unique, propriétaire institutionnel, copropriété, ou indivision.

Une fois que ces contraintes éventuelles auront été identifiées, il sera recommandé de les intégrer dans un cahier des charges.

La définition des besoins
Même dans les cas où les besoins peuvent paraître “standard”, il nous semble important de rédiger un cahier des charges qui sera remis à l’opérateur ou aux opérateurs pré-sélectionnés.

Ce document, qui pourra être rédigé directement par le propriétaire (ou le syndic de copropriété) ou par une société de conseil spécialisée, devra indiquer a minima le type d’immeuble, la taille, sa topologie (nombre d’étages, de logements, habitation et/ou bureaux, etc.), et intégrer le plan des parties communes avec, le cas échéant, les emplacements des gaines de câblage existantes, sans oublier d’intégrer les contraintes techniques et opérationnelles qui auraient pu être relevées.

Si le propriétaire souhaite que des précautions particulières soient prises pour le câblage afin de ne pas dénaturer le caractère de l’immeuble par exemple, cette exigence devra être définie, accompagnée éventuellement de propositions précises de la part de l’opérateur pour le câblage.

La sélection de l’opérateur d’immeuble
Il n’est malheureusement pas toujours possible de faire jouer la concurrence entre les opérateurs, notamment lorsque l’immeuble est situé en zone rurale ou peu urbanisée.

Par contre, si l’immeuble est situé dans une zone urbanisée, il est toujours préférable de mettre deux ou plusieurs opérateurs en concurrence, même si une offre de câblage a été faite à la copropriété par un opérateur. Parmi les critères à prendre en compte dans la sélection de l’opérateur, il sera important de savoir si l’opérateur a déployé la fibre dans la rue (déploiement horizontal), ce qui peut faciliter ensuite le déploiement dans l’immeuble (déploiement vertical), ou bien si l’opérateur est déjà opérateur d’immeuble dans le voisinage, etc.

En outre, le propriétaire peut se renseigner dans le voisinage, auprès des autres immeubles qui auraient déjà la fibre, sur la réalisation des engagements de l’opérateur d’immeuble retenu. Dans le cas d’un syndic, son expérience des relations avec les opérateurs d’immeuble dans les autres copropriétés qu’il gère peut également être utile à la sélection.

Les propriétaires ne disposent pas toujours d’une période étendue pour réaliser ces études préalables et définition des besoins. Pour les copropriétés, le syndic devra inscrire l’offre de câblage d’un opérateur à l’ordre du jour de la prochaine AG.(1) En cas de propriétaire unique, celui-ci ne pourra s’opposer au câblage en fibre optique que pour un motif “légitime et sérieux”, sachant que cette motivation est appréciée de manière restrictive par les tribunaux. Hormis le motif légitime de refus, l’offre de raccordement doit être faite dans un délai de 3 mois et les travaux dans les 3 mois suivant la proposition de raccordement.


2. La conclusion du projet et son suivi : la convention de déploiement de la fibre optique

La convention d’installation de la fibre
Les conditions d’installation de la fibre optique sont réglementées par le Code des postes et des communications électroniques (CPCE).(2) Une grande partie des règles relatives au déploiement et à l’accès au réseau de fibre optique énoncées au CPCE sont d’ordre public et se fondent sur les principes du libre accès à l’information et du droit à l’antenne (droit au raccordement au réseau à très haut débit).

L’article L.33-6 du CPCE dispose que les conditions d’installation, de gestion, d’entretien et de remplacement de lignes en fibre optique font l’objet d’une convention entre un opérateur d’immeuble et le propriétaire (ou le syndic pour le compte de la copropriété, dûment autorisé).

L’ARCEP a publié une nouvelle convention-type FttH en mai 2011, en remplacement d’une précédente convention-type datant de 2008.(3) Il ne s’agit cependant que d’une convention-type, fournissant un cadre contractuel aux parties, propriétaires et opérateurs d’immeubles.(4)

Aucune disposition législative n’impose l’utilisation de la convention-type. En application du principe de la liberté contractuelle, les parties restent libres de conclure une convention d’installation de la fibre optique dans des termes négociés, sous réserve du respect des dispositions réglementaires impératives (telles que la prise en charge des frais d’installation par l’opérateur d’immeuble, l’obligation de mutualisation des lignes, ou la durée des travaux d’installation qui ne doit pas excéder 6 mois, par exemple).(5)

Que les parties optent pour le modèle de convention-type ARCEP, ou qu’elles décident de conclure un contrat sur un autre modèle, la convention devra intégrer les éléments suivants : les conditions de suivi et de recette des travaux d’installation, les modalités d’accès aux parties communes de l’immeuble, la police d’assurance dans les conditions prévues à l’article 7 de la convention-type ; auxquels il est conseillé d’ajouter des engagements de qualité, les standards techniques mis en oeuvre par l’opérateur (spécifications techniques de l’installation pour la mise en oeuvre effective de la mutualisation du réseau avec les opérateurs commerciaux), le plan d’installation des lignes avec indication des points de raccordement et de terminaison, les modalités spécifiques de gestion, d’entretien et de remplacement des lignes pendant la durée de la convention, la durée (si dans le cas de la convention-type, celle-ci n’est pas de 25 ans), des modalités complémentaires relatives aux cas et à la procédure de résiliation anticipée de la convention, enfin, les modalités d’évolution de la convention.

Enfin, dans le cas des copropriétés, il est recommandé d’annexer l’extrait du procès-verbal de l’assemblée générale comprenant la résolution relative à l’accord de la copropriété sur l’installation de la fibre, habilitant le syndic à signer la convention d’installation avec l’opérateur pour le compte de la copropriété.

Le suivi de l’exécution des obligations de l’opérateur d’immeuble
De nombreux griefs sont opposés à l’encontre des opérateurs, depuis le non-respect du délai de 6 mois pour finaliser l’installation, en passant par les problèmes d’installations incomplètes (non raccordement au réseau horizontal - FttB), jusqu’aux problèmes des points de terminaison non installés chez les occupants, et les problèmes liés à la non-intéropérabilité du réseau pour bloquer l’accès aux opérateurs tiers (le principe et les conditions de la mutualisation du réseau étant définis à l’article L.34-8-3 du CPCE), etc.

Force est de constater que dans le cadre de l’installation de la fibre optique, puis de l’exécution de la convention, les (co)propriétaires doivent faire face à des difficultés de plusieurs ordres :
- l’absence de préparation du projet de déploiement de la fibre dans la copropriété ;
- le fait que de nombreux propriétaires ne tiennent pas à s’investir dans un projet technique tel que le déploiement de la fibre optique, et s’en remettent à l’opérateur ayant fait une proposition d’installation, sans mise en concurrence ;
- les délais de réaction et de prise de décision souvent soumis à la contrainte (nécessaire) de la tenue d’une AG dans le cas des copropriétés ;
- les problèmes de suivi en cas de manquement par l’opérateur à ses obligations contractuelles ;
- le caractère technique du dossier, pas toujours anticipé par les (co)propriétaires ;
- sans occulter le fort déséquilibre économique entre les parties (nombre très limité d’opérateurs face à une multitude de propriétés et copropriétés de toutes tailles), qui rend les négociations difficiles.

Il est cependant recommandé, pour les projets d’installation comme pour les conventions en cours d’exécution, de gérer le projet de manière attentive et suivi, avec à la clé une amélioration du niveau d’exécution des prestations.

* * * * * * * * * *

(1) Loi No2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, et plus particulièrement l’article 109 I et II
(2) Voir les articles L.33-1 et suivants, L.34-8-3 et suivant et R.9-2 et suivants du Code des postes et des communications électroniques (CPCE)
(3) A ce sujet, voir notre article “Qui est propriétaire de la fibre optique ?” (http://dwavocat.blogspot.com/2011/07/qui-est-proprietaire-de-la-fibre.html)
(4) La convention-type est accessible sur le site de l’Arcep à l’URL http://www.arcep.fr/index.php?id=10349
(5) Voir articles R.9-3 et R.9-4 du CPCE. Nous n’étudions pas ici les problèmes d’exécution pour les parties ayant déjà conclu une convention d’installation sur le modèle des conventions-type Arcep 2008 ou 2011. Concernant la convention-type Arcep 2011, il est en principe possible de négocier des avenants si les parties ont prévu des conditions d’évolution de la convention. Par contre, concernant les conventions conclues sur le modèle de la convention-type Arcep 2008, ou de la convention-type Arcep 2011 sans possibilité d’évolution de la convention, la seule possibilité offerte aux parties en cas de manquements substantiels serait de faire une demande de résiliation judiciaire de la convention.


Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Janvier 2012

lundi 18 juillet 2011

Qui est propriétaire de la fibre optique ?


Le cadre réglementaire relatif au déploiement des réseaux en fibre optique (FTTH) jusqu’aux abonnés est formalisé par une convention-type, éditée par l’ARCEP et signée entre les (co)propriétaires d’immeubles et les principaux opérateurs. (1) Cette convention a pour objet de définir les conditions d'installation, de gestion, d'entretien et de remplacement des lignes de fibre dans les immeubles.

Une première convention, datant de 2008, accorde la propriété de la fibre aux opérateurs d'immeuble pendant toute la durée de la convention (15 ans, renouvelable), mais sans définir qui en sera propriétaire à la date d’expiration de la convention.

Une étude, publiée par le cabinet Sia Conseil, a identifié les lacunes de ce texte. Les copropriétaires pourraient ainsi devenir propriétaires de ces infrastructures ; cette situation engendrerait, pour les opérateurs, des pertes financières conséquentes compte tenu des investissements réalisés pour le déploiement des réseaux internes des immeubles (ou réseaux verticaux).

L’ARCEP a édité une nouvelle convention, fin mai 2011, prévoyant la possibilité pour les opérateurs de rester propriétaires des infrastructures qu’ils ont installées, au terme de la convention (d’une durée de 25 ans, renouvelable). Ce texte s’applique aux futurs signataires. Cependant, la question de la propriété de la fibre pour les conventions déjà conclues reste en suspens.

Comment résoudre la question de la propriété du réseau FTTH à l'issue de la convention-type de 2008 ?

Plusieurs options sont envisageables :

- Le transfert de la propriété du réseau de l'immeuble à la copropriété : si l'on applique la convention-type de 2008 dans ses termes actuels, et hors dispositif réglementaire qui viendrait régler cette question, la propriété du réseau FTTH reviendrait de droit à la copropriété à l'issue de cette convention, à savoir, en 2023 pour les premières conventions conclues en 2008. Les copropriétés concernées deviendraient ainsi opérateurs d'immeuble et seraient soumises aux dispositions législatives et réglementaires applicables. La question de l'indemnisation de l'opérateur ayant déployé le réseau vertical dans l'immeuble n'est pas prévue. La copropriété-opérateur pourra alors faire payer un droit de passage aux opérateurs tiers sur la partie terminale du réseau jusqu'aux abonnés (application du principe de mutualisation de la partie terminale du réseau FTTH). (2)

- La négociation contractuelle : cette solution passera soit par la négociation et la signature d'un avenant à la convention, prévoyant les conditions relatives à la propriété du réseau au terme de la convention, soit éventuellement par la négociation de la résiliation anticipée de la convention en cours sous réserve des conditions de résiliation prévues à la convention, et l'application de la nouvelle convention-type de 2011. Cette option contractuelle est évidemment soumise à l'accord des deux parties, copropriétaires et opérateurs d'immeubles, ce qui entraînera probablement des négociations difficiles.

Il est cependant possible que soit l'ARCEP, soit le législateur prennent des mesures afin de résoudre la question par la voie réglementaire avant l'arrivée du terme des premières conventions, fin 2023.

La nouvelle convention-type de mai 2011, si elle apporte une réponse à la question de la propriété de la fibre, ne satisfait cependant pas tous les acteurs concernés.

La nouvelle convention stipule que l'opérateur d'immeuble qui a installé et financé le déploiement du réseau de fibre optique est responsable de son entretien, de sa maintenance et de son accès par des opérateurs tiers (principe de mutualisation). L'opérateur d'immeuble est et demeure propriétaire du réseau qu'il a installé au terme de la convention, et assure la continuité du service jusqu'à la prise en charge éventuelle du réseau par un nouvel opérateur d'immeuble, choisi par la copropriété. Le nouvel opérateur d'immeuble soit pourra racheter le réseau existant à l'opérateur précédent, soit devra déployer un nouveau réseau de fibre. La copropriété pourra également décider de devenir opérateur d'immeuble. (3)

Cependant, l'ARC (Association des Responsables de Copropriétés) s'oppose notamment à la durée de la nouvelle convention-type de 2011, portée à 25 ans (contre 15 ans pour la convention de 2008) et a appelé les copropriétés concernées à la boycotter.


En tout état de cause, la convention-type de l'ARCEP constitue un cadre contractuel de référence. Il ne s'agit en aucune manière d'un document imposé. Les parties, opérateurs d'immeubles et copropriétés, restent libres de signer leur propre contrat de déploiement de réseau de fibre optique dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires applicables.

En conclusion, en l'absence de disposition réglementaire précise, la question de la propriété du réseau FTTH risque fort de rester l'une des pierres d'achoppement des négociations entre opérateurs d'immeubles et copropriétés dans les mois, voire les années à venir.



(1) FTTH (ou FttH) signifie "Fiber to the Home", ou fibre jusqu'au domicile
(2) Le principe de mutualisation de la partie terminale du réseau de fibre optique a été défini par la Loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) et figure à l'article L34-8-3 du Code des postes et des communications électroniques.
(3) source: site de l'ARCEP: www.arcep.fr


Bénédicte DELEPORTE - Avocat

Deleporte Wentz Avocat

juillet 2011