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jeudi 1 mai 2025

AI Act : quelles obligations pour les fournisseurs de modèles d’IA à usage général (GPAI) ?


Ce qu’il faut retenir

Le Règlement européen sur l’intelligence artificielle (ou “AI Act”), adopté le 13 juin 2024, marque une avancée déterminante dans l’encadrement des technologies d’IA dans l’UE. Les fournisseurs de systèmes d’IA sont soumis à des obligations particulières en matière de conformité, de gouvernance, de sécurité et de transparence concernant le développement et la mise sur le marché de systèmes d’IA. Ce second article est une synthèse sur les obligations concernant les fournisseurs de modèles d’IA à usage général (GPAI).

 

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vendredi 25 avril 2025

AI Act : quelles obligations pour les fournisseurs de systèmes d’IA à haut risque ?

 

 

Ce qu’il faut retenir


Le Règlement européen sur l’intelligence artificielle (ou “AI Act”), adopté le 13 juin 2024, marque une avancée déterminante dans l’encadrement des technologies d’IA dans l’UE. Les fournisseurs de systèmes d’IA sont soumis à des obligations particulières en matière de conformité, de gouvernance, de sécurité et de transparence concernant le développement et la mise sur le marché de systèmes d’IA. Ce premier article est une synthèse sur les obligations concernant les fournisseurs de systèmes d’IA à haut risque.

 

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jeudi 25 juillet 2024

Entrée en vigueur de l’AI Act

 


Le règlement sur l’IA ("RIA" ou “AI Act”) a été adopté définitivement le 21 mai et publié au journal officiel de l’Union européenne le 13 juin 2024. Le règlement entrera en vigueur le 1er août 2024. Son entrée en application sera réalisée en plusieurs étapes, sur une période de 3 ans.

 

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jeudi 30 mai 2024

Un chatbot peut engager la responsabilité de l'éditeur du site web

 


Ce qu’il faut retenir

La mise en ligne par une société d’un chatbot sur son site web peut engager sa responsabilité en cas de fourniture de conseils ou d’informations erronés par cet outil.

 

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vendredi 29 mars 2024

Adoption de l'AI Act : une première étape vers un encadrement juridique de l'IA

 


Ce qu’il faut retenir

Le règlement sur l’intelligence artificielle, "RIA" ou “AI Act”, doit entrer en vigueur très prochainement. Texte majeur pour la protection des droits et le développement économique de l’IA en Europe, son objet est de responsabiliser les acteurs de l’IA, particulièrement concernant les IA à haut risque. L’application de ce règlement nécessitera pour les entreprises de se mettre en conformité, sous peine de condamnation à de lourdes sanctions. 

 

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vendredi 7 juillet 2023

Intelligence artificielle - une réglementation en construction

 

Ce qu'il faut retenir

L’Union européenne est entrain de construire un droit européen de l’intelligence artificielle : une proposition de règlement, dont l’objet est d’établir des règles harmonisées, a été publiée en avril 2021, axée sur les risques et la responsabilisation des producteurs de systèmes d’intelligence artificielle, suivie de deux propositions de directives le 28 septembre 2022, dont l’objet est de définir et d’encadrer le régime de responsabilité lié aux systèmes d’IA. Ce règlement devrait être adopté d’ici début 2024. Le présent article porte sur la proposition de règlement - ou AI Act.
 

mercredi 18 avril 2018

Des experts européens contre la création d'un statut juridique de personne électronique pour les robots

 
 
Alors que les applications d’intelligence artificielle se déploient à grande échelle, la Commission européenne travaille actuellement à l'élaboration d'un nouveau droit pour les robots. Or, des centaines de membres de la société civile s'opposent à la création d'une “personnalité électronique” qui pourrait attribuer une responsabilité à la machine.


Dans ce sens, deux cents experts européens viennent de signer une lettre ouverte contre “la création d'un statut juridique de personne électronique pour les robots”. Cette lettre, adressée à la Commission européenne, s’oppose plus spécifiquement au point de la résolution du Parlement européen du 16 février 2017 concernant des règles de droit civil sur la robotique (2015/2103 (INL)) relatif à “la création, à terme, d'une personnalité juridique spécifique aux robots, pour qu'au moins les robots autonomes les plus sophistiqués puissent être considérés comme des personnes électroniques responsables, tenues de réparer tout dommage causé à un tiers (…).”

Les signataires de la lettre ouverte critiquent cette notion de « personnalité électronique », que celle-ci repose sur le modèle de la personnalité physique, de la personnalité morale, ou sur le modèle du trust. Le débat reste à suivre…

                                                                        * * * * * * * * * * * *

(1) Robotics-openletter.eu, Open letter to the European Commission – Artificial intelligence and Robotics 

Photo © ClaudeAI.uk (https://claudeai.uk/ai-blog/ )

Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Avril 2018

lundi 31 juillet 2017

Après le Parlement européen, le CESE publie un avis sur l’intelligence artificielle (IA)


Après les recommandations sur la robotique, émises par le Parlement européen en février dernier (1), le Comité économique social et européen (CESE) vient de se prononcer sur ce sujet dans un avis publié le 31 mai 2017. (2)

L’intelligence artificielle (IA), comme toutes les technologies de rupture, présente de multiples avantages dans de nombreux domaines (industrie, services, éducation, etc.), mais pose également des risques et des défis en matière de sécurité, de contrôle des robots intelligents et de l’IA, ainsi qu’en matière d’éthique et de protection de la vie privée, sans oublier les impacts sur la société et l’économie.


IA et enjeux de société

Le CESE a relevé onze domaines dans lesquels l’IA soulève des enjeux de société et pour lesquels des réponses doivent être apportées : l’éthique ; la sécurité ; la vie privée ; la transparence et l’obligation de rendre des comptes ; le travail ; l’éducation et les compétences ; l’(in)égalité et l’inclusion ; la législation et la réglementation ; la gouvernance et la démocratie ; la guerre ; la superintelligence.


IA et travail : la seconde ère du machinisme

Le CESE se penche également sur l’incidence de l’IA sur le travail, à savoir, l’emploi, les conditions de travail et les régimes sociaux. Selon Erik Brynjolfsson et Andrew McAfee, professeurs à MIT et auteurs de “The Second Machine Age”, il existe une différence majeure entre la première et la seconde ère du machinisme. La première ère du machinisme a consisté dans le remplacement de la force musculaire (animale, humaine) par les machines. Les répercussions ont porté principalement sur les travailleurs manuels et peu qualifiés. Or avec la seconde ère du machinisme, tous les secteurs de l’industrie et de l’économie sont concernés. Les machines “intelligentes” développent des compétences cognitives et peuvent réaliser des prestations intellectuelles. Ainsi, les répercussions porteront non seulement sur les travailleurs peu qualifiés, mais aussi sur les travailleurs diplômés.

De nombreuses catégories d’emplois, aujourd’hui tenus par des humains, devraient disparaître dans les décennies à venir, au profit de robots plus ou moins intelligents et plus ou loins autonomes. Toutefois, de nouveaux emplois devraient voir le jour, bien que l’on ne soit pas en mesure aujourd’hui de prédire leur nature ou leur nombre. En conséquence, l’un des points fondamentaux sera de permettre au plus grand nombre d’acquérir et de développer des compétences numériques.


IA et réglementation

Un autre point abordé par le CESE concerne la réglementation. Le Comité a d’ores et déjà identifié 39 règlements, directives, déclarations et communications qui devront être révisés ou adaptés par l’UE, ainsi que la Charte européenne des droits fondamentaux pour prendre en compte l’IA.


Des préconisations communes à celles du Parlement européen ...

Certaines des préconisations du Comité rejoignent celles émises par le Parlement européen. Le CESE préconise notamment :

    - l’instauration d’un code européen de déontologie pour le développement, le déploiement et l’utilisation de l’IA, “afin que les systèmes d’IA demeurent, tout au long de leur processus d’exploitation, compatibles avec les principes de dignité humaine, d’intégrité, de liberté, de respect de la vie privée, de diversité culturelle et d’égalité entre hommes et femmes, ainsi qu’avec les droits fondamentaux”. Ainsi, les questions éthiques concernant le développement de l’IA doivent être abordées. Les systèmes d’IA doivent être développés et déployés “dans les limites de nos normes, valeurs et libertés fondamentales et des droits de l’homme”. Ces règles devraient s’appliquer, de manière uniforme, à l’échelle mondiale ;

    - la mise en place d’un système européen de normalisation pour la vérification, la validation et le contrôle des systèmes d’IA, fondé sur des normes de sécurité, de transparence, d’intelligibilité et d’obligation de rendre des comptes. Le Comité reconnaît que la robotique doit être réglementée au niveau pan-européen, notamment pour des raisons concurrentielles sur le marché mondial.


Mais une divergence de fond sur le statut juridique du robot

Enfin, et contrairement au Parlement européen, le Comité se prononce contre la création d’une personnalité juridique spécifique pour les robots. Le CESE prône une approche dite “human-in-command” de l’IA, reposant sur un développement responsable, sûr et utile de l’IA, dans le cadre duquel “les machines resteraient les machines, sous le contrôle permanent des humains”. Pour le CESE, une personne physique devra toujours rester responsable en dernier ressort.


     Le Comité économique social et européen, en qualité de représentant de la société civile européenne souhaite poursuivre la réflexion sur l’IA en y associant toutes les parties prenantes concernées dans les domaines de la politique, de l’économie et de l’industrie, la santé et l’éducation notamment. En effet, compte tenu de la nature transverse des questions posées par l’évolution de l’IA et de ses impacts multiples sur la société, le débat doit couvrir tous les pans de la société sur lesquels l’IA est susceptible d’avoir une incidence.

                                                                      * * * * * * * * * * * *

(1) “Résolution du Parlement européen du 16 février 2017 contenant des recommandations à la Commission concernant des règles de droit civil sur la robotique” (2015/2103(INL)), et voir notre article “De la science-fiction au droit : vers un cadre juridique européen de la robotique à l’aube d’une nouvelle révolution industrielle” publié en mai 2017

(2) Avis du Comité économique et social européen “L’intelligence artificielle – Les retombées de l’intelligence artificielle pour le marché unique (numérique), la production, la consommation, l’emploi et la société”, 31 mai 2017, (INT/806 – EESC-2016-05369-00-00-AC-TRA (NL))

 
Photo © ClaudeAI.uk (https://claudeai.uk/ai-blog/ ) 
 
Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Juillet 2017

samedi 6 mai 2017

De la science-fiction au droit : vers un cadre juridique européen de la robotique à l’aube d’une nouvelle révolution industrielle


Le 16 février 2017, le Parlement européen a adopté une résolution comprenant une série de recommandations à l’attention de la Commission européenne, relatives aux règles de droit civil en matière de robotique. (1) Par le biais de ce document, le Parlement demande à la Commission de présenter une proposition de directive sur la base de ces recommandations. Ce texte a été adopté après deux ans de discussions, cette durée ayant été nécessaire pour mener une réflexion riche et approfondie sur un sujet protéiforme, amené à révolutionner notre société civile, industrielle et économique.

La robotique recouvre non seulement les robots, l’intelligence artificielle, mais également les bots, les drones, les véhicules autonomes. Ce domaine soulève des questions éthiques et juridiques qu’il est nécessaire d’aborder dès maintenant à un niveau supra national, sachant que la robotique est déjà très présente dans les secteurs de l’industrie automobile et de l’électronique.

La résolution du Parlement souligne notamment la nécessité de définir un cadre éthique autour de la conception, la programmation et l’utilisation des robots, de définir un cadre légal autour de la robotique pour permettre son développement harmonisé et juridiquement sécurisé, et enfin de définir de nouvelles règles de responsabilité pour les actes réalisés par les robots intelligents.


1. Un cadre éthique qui s’appuie sur les lois de la robotique d’Asimov

La “bonne” science-fiction s’avère souvent prémonitoire de l’évolution technologique et sociologique. De nombreux outils technologiques de plus en plus complexes apparaissent peu à peu dans notre univers quotidien, inspirés des “gadgets” communicants de la saga Star Trek (smart phones et objets connectés), en passant par les films Minority Report et Moneyball (analyse prédictive), ou 2001 l’Odyssée de l’Espace et I, Robot (robots intelligents). (2)

Dans ce sens, Issac Asimov, célèbre auteur de science-fiction du XXé siècle, a défini les trois lois de la robotique, régissant les relations entre l’homme et le robot :
    1. un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, en restant passif, permettre qu'un être humain soit exposé au danger ;
    2. un robot doit obéir aux ordres qui lui sont donnés par un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la première loi ;
    3. un robot doit protéger son existence tant que cette protection n'entre pas en conflit avec la première ou la deuxième loi. (3)

Ces lois ont été reprises par les membres du Parlement européen pour établir les fondements de leurs recommandations sur l’ébauche du droit civil européen de la robotique, rappelant au passage “les valeurs humanistes intrinsèquement européennes et universelles qui caractérisent la contribution de l’Europe à la société”. Ces lois doivent s’appliquer en particulier aux concepteurs, aux fabricants et aux opérateurs de robots.

Sur la base de ces fondements, le Parlement européen recommande de développer un cadre éthique clair, précis et efficace applicable à la conception, au développement, à la production, à l’utilisation et à la modification des robots.

Les robots doivent être au service de l’homme, en réalisant des tâches répétitives, difficiles ou dangereuses par exemple. Mais la robotique, par ses implications sociales, médicales et bioéthiques, pose également des risques sociétaux aux humains, notamment en matière de liberté, de sécurité, de santé, du respect de la vie privée et de la protection des données personnelles, de l’intégrité et de la dignité.

Concrètement, la résolution du Parlement comprend en annexe une charte sur la robotique, composée d’un code de conduite éthique pour les ingénieurs en robotique, d’un code de déontologie pour les comités d’éthique de la recherche, et des licences-types pour les concepteurs de robots et les utilisateurs.

Le code de conduite éthique pour les ingénieurs en robotique couvre toutes les activités de recherche et développement et rappelle l’obligation pour les chercheurs et les concepteurs de “la nécessité de respecter la dignité, la vie privée et la sécurité des personnes”. Ce cadre éthique de référence devrait se fonder sur les principes de bienfaisance (les robots agissent au mieux des intérêts de l’homme), de non-malfaisance (les robots ne doivent pas nuire à l’homme), d’autonomie (la capacité de prendre une décision en connaissance de cause et sans contrainte quant aux modalités d’interaction avec les robots), et de justice (répartition équitable des bénéfices liés à la robotique ; caractère abordable des robots utilisés dans la santé). Le code pose également les principes de droits fondamentaux, de précaution, de transparence, de sécurité, de réversibilité, de protection de la vie privée.

Le code de déontologie pour les comités d’éthique de la recherche met en avant le principe d’indépendance, afin d’éviter les conflits d’intérêts entre les chercheurs et les examinateurs du protocole d’éthique, et entre les examinateurs et les structures de gouvernance organisationnelles. Le code définit par ailleurs le rôle et la composition d’un comité d’éthique de la recherche ainsi que des règles de contrôle.


2. Les fondations d’un cadre juridique : définir la notion de robot et garantir le développement de la cyber-technologie

La résolution du Parlement comprend également plusieurs recommandations ayant pour objet de poser les bases d’un cadre juridique adapté à la robotique, harmonisé dans l’Union. Ces règles de droit doivent permettre l’utilisation transfrontalière des robots (principe de reconnaissance mutuelle), en évitant la fragmentation du marché européen.

    - La notion de “robot intelligent”
Le Parlement demande à la Commission de proposer des définitions communes au sein de l’Union européenne concernant les notions de systèmes cyber-physiques, de systèmes autonomes et de robots autonomes et intelligents, et leurs sous-catégories. Ainsi un “robot intelligent” comprendrait les caractéristiques suivantes :
. acquisition d’autonomie grâce à des capteurs et/ou à l’échange de données avec l’environnement (interconnectivité),
. capacité d’auto-apprentissage à travers l’expérience et les interactions,
. existence d’une enveloppe physique, même réduite,
. capacité d’adaptation de son comportement et de ses actes à son environnement, et
. non vivant au sens biologique du terme.

Un système d’immatriculation communautaire de certaines catégories de robots “avancés” pourrait être créé.

    - Les droits de propriété intellectuelle
Le Parlement attire par ailleurs l’attention sur la nécessité d’aborder la question des droits de propriété intellectuelle dans le domaine de la robotique, par une approche transversale et technologiquement neutre sur les divers secteurs dans lesquels la robotique pourra être utilisée.

    - Le droit au respect de la vie privée et la protection des données personnelles
L’application du droit au respect de la vie privée et de la protection des données personnelles dans les relations entre les humains et les robots est essentielle. En effet, les robots qui seront utilisés par les particuliers dans un environnement domestique pour un usage quotidien (véhicules autonomes, robots domestiques, robots de soins à la personne et robots médicaux) collecteront et traiteront des données personnelles. Ces robots seront généralement connectés, les données pourront donc être non seulement analysées mais également partagées.

Les règles communautaires sur le droit au respect de la vie privée ainsi que les dispositions du règlement général sur la protection des données (RGPD), notamment les règles relatives à la sécurité des systèmes, doivent s’appliquer à la robotique. Cependant, ces règles doivent pouvoir être complétées si nécessaire, pour prendre en compte les spécificités de la robotique.

    - Les questions de normalisation, sûreté et sécurité
Le développement de la robotique passe par l’élaboration de normes techniques harmonisées au niveau international pour éviter le morcellement du marché européen, garantir un niveau élevé de sécurité des produits et de protection des consommateurs. Par ailleurs, la communication entre les robots impliquera l’adoption de normes ouvertes et leur interopérabilité.

Afin d’éviter la fragmentation du marché européen, les tests, certificats et accords de mise de robots sur le marché, réalisés dans un pays, devraient être reconnus dans les autres Etats-membres.

    - L’éducation et l’emploi
La généralisation de l’utilisation des robots va entraîner une nouvelle révolution industrielle et sociétale. Même si l’impact réel sur l’emploi n’est pas encore connu, les emplois les moins qualifiés seront les plus affectés ainsi que les industries à forte densité de main-d’oeuvre. La robotisation induira notamment une plus grande flexibilité des compétences. A ce titre, le Parlement demande à la Commission de faire un suivi sur les évolutions à moyen et long terme concernant l’impact de la robotique sur l’emploi, et de supporter la formation au numérique afin d’aligner le marché de l’emploi sur la demande à venir.

Enfin, le Parlement recommande la création d’une Agence européenne pour la robotique et l’intelligence artificielle pour apporter une expertise technique, éthique et réglementaire aux niveaux communautaire et nationaux.


3. La question de la responsabilité : un robot autonome peut-il être assimilé à une personne responsable de ses actes ?

Un robot autonome (capacité d’adaptation, d’apprentissage) peut prendre des décisions et les mettre en pratique de manière indépendante. Son comportement comprend donc un certain degré d’imprévisibilité. Cette autonomie est néanmoins purement technique. En outre, plus un robot est autonome, moins il peut être considéré comme un outil contrôlé par un tiers (fabricant, opérateur, propriétaire). Ainsi, un statut spécifique - la personne électronique - pourrait être créé pour les robots autonomes.

Les règles juridiques actuelles en matière de responsabilité ne sont pas adaptées aux robots autonomes. Ceux-ci ne peuvent être reconnus responsables de leurs actes en cas de dommage causé à un tiers. En l’état actuel du droit, la responsabilité repose sur l’homme, à savoir le fabricant (responsabilité du fait des produits), l’opérateur, le propriétaire ou l’utilisateur du robot (responsabilité en cas de dommage). Le cas du robot autonome n’est donc pas couvert.

Le Parlement demande une évaluation de l’environnement de la responsabilité afin de déterminer le régime le plus approprié au domaine : responsabilité objective (rapporter la preuve du dommage, le dysfonctionnement du robot et le lien de causalité entre le dysfonctionnement et le dommage), ou régime de responsabilité basée sur la gestion du risque (capacité à gérer le risque et ses répercussions).

La responsabilité des personnes devrait être proportionnelle au niveau d’instructions données et d’autonomie du robot (plus un robot est autonome, plus la responsabilité de la personne l’ayant formé sera élevée). En parallèle, un système spécifique d’assurance des robots devra être mis en place.


    En conclusion, cette résolution du Parlement européen parvient à proposer des orientations pratiques sur un sujet éminemment complexe, dont nous ne connaissons pas encore tous les impacts sur notre société. Le mérite de ce document est de réaliser une synthèse des problématiques posées par la robotique. Cette résolution propose les grandes lignes d’un cadre juridique dont l’objet est de sécuriser le développement de la robotique et de ses multiples usages, et pose les fondements éthiques nécessaires pour éviter les dérives et tenter de circonscrire les craintes liées aux conséquences d’un développement incontrôlé de l’intelligence artificielle. La balle est désormais dans le camp de la Commission européenne pour proposer une directive dans des délais raisonnables, afin que l’Europe ne soit pas prise de court face à une évolution très rapide dans ce domaine.


                                                                       * * * * * * * * * * * *

(1) “Résolution du Parlement européen du 16 février 2017 contenant des recommandations à la Commission concernant des règles de droit civil sur la robotique” (2015/2103(INL))

(2) Ces films sont, pour la plupart, adaptés de livres : Minority Report (par Philip K. Dick, publié en 1956!) ; Moneyball (The Art of Winning an Unfair Game, par Michael Lewis, publié en 2003) ; I, Robot (par Eando Binder publié en 1939 et réécrit par Isaac Asimov en 1950)

(3) Les trois lois de la robotique d’Asimov apparaissent dans Cercle Vicieux (Runaround), publié en 1942.



Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Mai 2017

jeudi 16 juillet 2015

Drones : les recommandations du G29 en matière de protection de la vie privée

   Le marché européen des drones est en plein essor. Ces “aéronefs télépilotés” sont utilisés dans de multiples domaines : sécurité publique (surveillance de manifestations sur la voie publique, lutte anti-incendie, sécurité de zones touchées par des accidents industriels, comme à Fukushima par exemple), surveillance de l’état des infrastructures ou de bâtiments, tournages de reportages d’information (inondations), sportifs (Tour de France), ou culturels, mais également dans les loisirs (aéromodélisme).

Toutefois, leur commercialisation et leur utilisation soulèvent des enjeux importants, notamment en matière de respect de la vie privée. Les drones peuvent
en effet être équipés d’appareils photo, de caméras ou de capteurs sonores. Ces engins peuvent ainsi collecter, stocker, transmettre ou analyser une masse d’informations, et surveiller nos comportements et nos déplacements en toute discrétion et à notre insu.

A ce jour, il n’existe pas de réglementations harmonisées en Europe en matière de drones. La Commission européenne a annoncé en avril 2014, son intention de se pencher sur une réglementation européenne pour encadrer l’usage des drones civils. (1) Une proposition de la Commission est attendue pour fin 2015, mais dès 2014 celle-ci avait affirmé que « Les données collectées par les drones devront être conformes aux règles applicables en matière de protection des données et les autorités chargées de la protection des données devront surveiller la collecte et le traitement ultérieur des données à caractère personnel ». La Commission précisait en outre, qu’elle examinerait comment garantir que les règles de protection des données s’appliquent pleinement aux aéronefs télépilotés et proposera des modifications ou des orientations spécifiques en tant que de besoin.

    Sans attendre la proposition de la Commission européenne, le G29 (groupe de travail rassemblant les représentants de chaque autorité de protection des données nationales) a publié en juin 2015 un avis sur les drones. (2)

Dans cet avis, le G29 identifie les risques d’atteinte à la vie privée et souligne notamment le manque de transparence quant aux types de traitements effectués, de données collectées et de finalités poursuivies, dès lors qu’un traitement de données est réalisé par le biais d’un drone. Pour contenir ces risques, le G29 fournit une liste de recommandations à destination des opérateurs, utilisateurs et fabricants de drones, ainsi qu’aux législateurs européens et nationaux.

- Les opérateurs ou les utilisateurs de drones sont ainsi invités à (i) se renseigner sur les formalités obligatoires à accomplir auprès de la Direction de l’aviation civile de leur pays, (ii) ne collecter que les données strictement nécessaires au traitement et à ce titre, installer sur leurs drones des technologies ne permettant pas de collecter plus de données que nécessaire, et (iii) informer par tous moyens les personnes concernées des conditions de la collecte et du traitement de leurs données (par exemple, par la distribution de prospectus aux participants d’un événement public au cours duquel des drones sont utilisés ou par la publication d’un message éditorial sur le site internet de l’opérateur).

- Les fabricants et les opérateurs sont notamment invités à (i) promouvoir et adopter un code de conduite, (ii) rendre leurs drones plus visibles, à l’aide de lumières clignotantes ou de couleurs vives par exemple, et (iii) insérer dans les emballages de drones de petites tailles une notice d’information sur la nature intrusive de la technologie et le nécessaire respect de la réglementation applicable.

- Les législateurs européens et nationaux sont invités à promouvoir un cadre légal (i) offrant des garanties en matière de sécurité et de respect des droits fondamentaux, (ii) imposant notamment le respect de la vie privée comme exigence pour l’obtention d’une qualification ou d’une licence en vue d’une utilisation commerciale du drone et (iii) instaurant un régime spécifique de responsabilité pour l’utilisation de drones.

Enfin, le G29 insiste sur le fait que le recours à cette technologie par les autorités policières (i) ne peut être généralisé et doit être expressément prévu et justifié par un texte, (ii) doit respecter les principes fondamentaux posés par la réglementation sur la protection des données personnelles (nécessité, proportionnalité, finalité déterminée, etc.), et en toute hypothèse, ne peut donner lieu à la surveillance constante d’un individu, sauf cas particuliers.


    Il est intéressant de souligner que quelques jours à peine après la publication de cet avis du G29, le Parlement européen a divulgué son projet de rapport sur l’utilisation des drones dans le domaine de l’aviation civile. (3) Dans ce texte, le Parlement précise que « la question de la protection des données et de la vie privée est essentielle en vue de faciliter le développement et l’intégration en toute sécurité des systèmes d’aéronefs télépilotés dans l’aviation civile ». Le Parlement estime que la législation sur la protection de la vie privée et les données personnelles, tout comme celle relative à la navigation aérienne, devrait figurer dans une notice d’information aux acquéreurs.

Néanmoins, le Parlement souligne qu’« une nouvelle législation spécifique pour la protection des données dans le domaine des systèmes d'aéronefs télépilotés ne devrait pas être nécessaire » et estime, à ce titre, que « les agences compétentes pour la protection des données dans les États membres devraient partager les orientations spécifiques en matière de protection des données pour les drones à caractère commercial, et invite les États membres à mettre en oeuvre rigoureusement la législation concernant la protection de données, de sorte que ces deux éléments répondent aux préoccupations des citoyens en matière de vie privée et que les exploitants des systèmes d'aéronefs télépilotés ne doivent pas faire face à une charge administrative disproportionnée ».

Il convient donc d’attendre la publication de la proposition de la Commission pour connaître l’ampleur des exigences européennes en matière de drones et de respect de la vie privée.

                                                                      * * * * * * * * * * *

(1) Communiqué de presse de la Commission européenne du 8 avril 2014, « La Commission européenne préconise des normes strictes pour réglementer l'utilisation des drones civils ».

(2) Article 29 Data Protection Working Party, Opinion 01/2015 on Privacy and Data Protection Issues relating to the Utilisation of Drones, June 16th 2015 (WP 231).

(3) Parlement européen, Commission des transports et du tourisme, projet de rapport sur l’utilisation d’aéronefs télépilotés (RPAS ou UAV), dans le domaine de l’aviation civile, du 19 juin 2015.



Betty SFEZ
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Juillet 2015

lundi 24 février 2014

L’essor de l’utilisation des drones à usage civil et la réglementation



 Fin janvier 2014, un jeune entrepreneur de 18 ans a survolé et filmé la ville de Nancy grâce à un drone équipé d’une caméra GoPro, puis a posté sa vidéo sur internet. Ce film a été visionné plus 400 000 fois ! Le jeune homme ignorait apparemment que l’utilisation d’un drone muni d’une caméra, a fortiori pour survoler une zone peuplée, est réglementée.

La vidéo a notamment été remarquée par les autorités qui n’ont pas manqué de contacter son auteur : dans un premier temps, la Direction régionale de l’aviation civile (DRAC) a rappelé au jeune homme les règles en vigueur en matière d’utilisation de drones et enjoint ce dernier de se mettre en conformité ; dans un second temps, le jeune entrepreneur a été informé par la gendarmerie qu’il était convoqué devant le tribunal correctionnel pour mise en danger de la vie d’autrui. (1)

Bien que le marché des drones soit en plein essor, leur utilisation est réglementée, suivant la catégorie d’appareil, leur type d’utilisation, etc. Nul n’étant censé ignorer la loi, l’affaire de la video de Nancy nous donne l’occasion de faire un point sur la réglementation en vigueur et  sur les questions juridiques que soulève l’utilisation des drones.


1. Les questions de sécurité et de protection de la vie privée soulevées par l’essor du marché des drones civils

Les drones sont définis comme des aéronefs télépilotés ou des aéronefs sans pilote à bord, dirigés à distance, avec une télécommande ou un smartphone.

Il existe de multiples catégories de drones, depuis des appareils de quelques centaines de grammes ayant un rayon et une durée de vol limités, généralement destinés aux loisirs, jusqu’à des appareils de plusieurs dizaines (voire de centaines) de kilos, pouvant parcourir de longues distances et voler à plusieurs centaines de mètres d’altitude. Ces appareils sont généralement utilisés à des fins professionnelles. Les drones peuvent par ailleurs être équipés d’appareils photo, de caméras, mais également de capteurs de température ou de composition de l’air, ou encore être utilisés pour larguer des pesticides ou autres charges.

Ces “aéronefs télépilotés” sont utilisés depuis plusieurs années dans des domaines divers :  sécurité publique (surveillance de manifestations sur la voie publique, lutte anti-incendie, sécurité de zones touchées par des accidents industriels, comme à Fukushima par exemple), surveillance de l’état des d’infrastructures ou de bâtiments, tournages de reportages d’information (inondations), sportifs (Tour de France), ou culturels, mais également dans les loisirs (aéromodélisme).

Malgré le fort potentiel économique lié à l’essor du marché des drones civils, leur utilisation suscite de nombreuses questions juridiques, particulièrement en matière de sécurité publique et de respect de la vie privée. (2)

    - En matière de sécurité, d’une part : l’utilisation incontrôlée de drones peut interférer avec d’autres types d’aéronefs (ULM, hélicoptères et avions en phases de décollage ou d’atterrissage), l’utilisation d’un drone en zone fortement peuplée dont le pilote aurait perdu le contrôle peut tomber sur la foule ; enfin, on ne peut écarter les risques d’utilisation à des fins terroristes. Bien qu’aucun accident de ce type n’ait été reporté à ce jour, ces risques doivent néanmoins être pris en compte avec le développement de l’utilisation des drones.

    - En matière de respect de la vie privée, d’autre part : un drone peut être employé à des fins intrusives. Certains modèles peuvent être équipés de caméras aux performances assez précises pour permettre d’identifier des personnes physiques à leur insu par exemple.

L’utilisation des drones n’est pas interdite, mais commence à être réglementée.


2. L’encadrement réglementaire de l’utilisation des drones civils dans l’espace aérien

La France est le premier pays à avoir instauré une réglementation spécifique en matière de drones, avec la publication de deux arrêtés du 11 avril 2012 relatifs d’une part, à la conception, l’utilisation et aux capacités requises pour faire voler de tels engins, et d’autre part, à l’utilisation de l’espace aérien par ces aéronefs. (3)

Ces deux textes complémentaires, visant à garantir la sécurité publique, ont respectivement pour objet de déterminer les différentes catégories d’aéronefs télépilotés et la nature des activités concernées, et d’encadrer l’utilisation de l’espace aérien compte tenu des différents modes d’utilisation des drones civils (activités d’aéromodélisme, activités particulières et vols expérimentaux).

Ce dispositif réglementaire a mis fin à un vide juridique. Même s’il ne résout pas toutes les questions juridiques posées par les différents modes d’utilisation des drones, ce cadre permet aux industriels de développer leurs offres en matière d’équipement et aux opérateurs de les utiliser légalement.

Les drones civils sont classés selon plusieurs catégories, de A à G. Ce classement dépend de leur masse, de leur type de propulsion et limitation et de la nature des activités concernées. Les obligations qui en découlent dépendent du mode d’utilisation de l’aéronef : vitesse, hauteur de vol (vol en vue de jour ou vol hors vue), type de zone survolée (peuplée ou non) et de la finalité (ou “scénario”).

Seuls, les aéromodèles de catégorie A (moins de 25 kgs, comportant un seul type de propulsion et sans caméra), ne pouvant circuler qu’en vue directe de leur télépilote, sont dispensés de document de navigabilité et sont autorisés à voler sans condition particulière concernant les capacités requises de leur utilisateur.

En revanche, l’utilisation des autres catégories de drones (notamment ceux équipés de caméra) est soumise, suivant la catégorie de l’aéronef concerné et le type d’activité, à l’obtention d’une autorisation délivrée par le ministre chargé de l’aviation civile ainsi qu’à l’installation de dispositifs spécifiques (capteur barométrique permettant au télépilote de connaître l’altitude ou dispositif “fail-crash” permettant de forcer un atterrissage), un niveau de compétence minimum du télépilote et la détention de documents spécifiques (manuels d’utilisation et d’entretien, document de navigabilité, manuel d’activités particulières (MAP).

L’exploitant d’un aéronef est responsable de la mise en œuvre de toutes les mesures de sécurité nécessaires pour assurer la sécurité des tiers et du respect des exigences applicables au drone qu’il exploite et au télépilote qu’il emploie.

Hormis les considérations relatives à la sécurité se posent des questions relatives au respect de la vie privée pour l’utilisation des drones embarquant appareils photo ou caméras.


3. La protection de la vie privée en question


La commercialisation et l’utilisation des drones civils soulèvent des enjeux importants, notamment en matière de libertés individuelles et de respect de la vie privée.

Les drones peuvent être équipés d’appareils photo, de caméras ou de capteurs sonores. Ces engins peuvent ainsi collecter, stocker, transmettre ou analyser une masse d’informations, et surveiller nos comportements et nos déplacements en toute discrétion et à notre insu.

En effet, en fonction des caractéristiques techniques de ces appareils, les photos et les vidéos prises peuvent permettre de distinguer et d’identifier des personnes physiques ou des véhicules (et plaques d’immatriculation).

    3.1  La question du droit à l’image
Dès lors qu’un drone capte et fixe l’image d’une personne physique, on peut s’interroger sur  le respect du droit à l’image de cette personne.

Le Code civil (notamment l’article 9) et la jurisprudence affirment que toute personne a sur son image et sur l’utilisation qui en est faite un droit exclusif et peut s’opposer à sa diffusion sans son autorisation.

Si un drone à usage professionnel ou un drone de loisir venait à capter l’image d’une personne (photographie ou video), la publication de cette image serait autorisée sous réserve d’avoir obtenu le consentement de la personne concernée. Or, l’obtention de ce consentement n’est généralement pas réalisable en pratique.

Toutefois, l’exigence de l’autorisation de la personne concernée connaît une exception lorsque celle-ci se trouve dans un lieu public. Selon la jurisprudence applicable, la publication de photographies prises dans des lieux publics (telles que des images de groupes de personnes ou un reportage sur une manifestation publique) n’est pas subordonnée à l’accord de toutes les personnes apparaissant sur ces images. Il s’agit là d’une approche pragmatique : si l’autorisation devait être systématique, toute publication de photographies de foules ou de manifestations publiques pour illustrer un reportage serait impossible.

Les tribunaux ont cependant émis quelques réserves : (i) la photographie ne doit pas permettre d’individualiser une personne en particulier, c’est-à-dire faire de cette personne le sujet principal de l’image et la rendre reconnaissable ; (ii) l’image ne doit pas porter atteinte à la dignité humaine ; et (iii) dans le cas d’événements d’actualité, la publication de l’image ne doit pas dépasser les limites du droit à l’information (répondre au besoin d’information de la société, une image en relation directe avec l’événement d’actualité et une image non détournée de son objet).

Ainsi, la captation d’images par un drone muni d’un appareil photo ou d’une caméra, lors de manifestations publiques (concerts, manifestations sportives, rassemblements politiques, etc.) doit respecter ces grands principes. A défaut, l’utilisateur de l’appareil pourrait faire l’objet de poursuites judiciaires pour atteinte au droit à l’image de la personne photographiée ou filmée à son insu.

    3.2  La question de la protection des données personnelles
Par ailleurs, la captation de l’image d’une personne physique par un drone équipé d’un appareil photo ou d’une caméra correspond à un enregistrement de données personnelles. Or, la diffusion de ces données peut porter atteinte à la vie privée des personnes filmées.

La captation et l’enregistrement d’images relatives aux personnes physiques relèvent de la loi Informatique et Libertés. (4) Cette loi encadre la collecte et le traitement des données à caractère personnel, à savoir toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, y compris par la captation de son image, mais également de la plaque d’immatriculation de son véhicule par exemple.

Les obligations pesant sur le responsable du traitement comprennent l’accomplissement de formalités préalables auprès de la CNIL (déclaration ou autorisation du traitement), le respect d’exigences en matière de durée de conservation et de sécurité des données personnelles, et le respect des droits des personnes concernées par le traitement de leurs données (informations concernant le traitement et leurs droits d’accès, de rectification et d’opposition).

Dès lors, on doit s’interroger sur la façon de transposer ces obligations à l’utilisation d’un drone civil.

Il paraît difficile de “flouter” systématiquement les visages des personnes filmées par un drone avant diffusion du film.

La loi Informatique et Libertés prévoit des règles spécifiques pour certains types de traitements tels que la géolocalisation ou la vidéosurveillance.

La vidéosurveillance est soumise à des règles distinctes selon le lieu d’installation du dispositif : dans un lieu ouvert au public et sur la voie publique, dans un lieu non ouvert au public ou à domicile.

Pour les dispositifs de vidéosurveillance mis en œuvre sur la voie publique, seules les autorités publiques sont habilitées à filmer la zone, et uniquement pour prévenir des atteintes à la sécurité des personnes et des biens ou des actes de terrorisme. Les personnes autorisées à consulter les images issues de ce dispositif doivent être habilitées par autorisation préfectorale.

Si l’on considère que les drones équipés de caméras peuvent s’apparenter à des systèmes de surveillance, on peut dès lors s’interroger sur l’application du régime de la vidéosurveillance à ce type d’utilisation. Toutefois, la transposition de ces règles à l’utilisation des drones peut s’avérer complexe : qui peut utiliser un drone filmant la voie publique et qui est habilité à visionner les images captées par le drone ? Dés lors qu’un drone filme la voie publique, comment en pratique les personnes filmées peuvent être informées qu’un tel système a été mis en place, et s’opposer à la captation de leur image ?

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a engagé une réflexion prospective depuis 2012 au sujet de l’utilisation des drones et du respect de la vie privée. (5) L’un des axes de réflexion est de s’assurer que ces nouveaux usages n’entraînent pas de dérives en matière de surveillance. Parallèlement à ces travaux prospectifs, la CNIL est engagée dans des échanges internationaux sur ce sujet qui est à l’ordre du jour du G29 (organisme regroupant l’ensemble des CNIL européennes). Des recommandations en la matière sont donc attendues.


   Il n’existe à ce jour aucun texte européen relatif à la conception et à l’utilisation des drones. L’Europe compterait pourtant actuellement 400 sites de production de drones civils et de plus en plus d’utilisateurs.

Consciente du potentiel économique de ce marché, la Commission s’est récemment saisie de la question en créant un groupe de travail qui a eu pour mission d’éditer une feuille de route sur l’intégration sécurisée dès 2016 des drones civils dans le système d’aviation européen. (6) Ce rapport reprend les questions liées à l’utilisation de ces appareils : la sécurité, d’une part, et le respect de la vie privée, d’autre part.

Toutefois, il semble qu’aucun texte sur le sujet ne soit en cours discussion devant les instances européennes. Le projet de règlement européen sur la protection des données personnelles devant être adopté dans les mois à venir, vise à réformer les règles en matière de collecte et traitement des données, mais ne contient pas de dispositions spécifiques aux aéronefs télépilotés.

La France a pris les devants avec les deux arrêtés d’avril 2012. Même s’ils ne règlent pas toutes les questions posées, ces textes ont le mérite de poser un cadre de référence. Le défi sera de conserver l’équilibre entre un cadre réglementaire peu contraignant et stable et la protection des libertés fondamentales (sécurité civile et respect de la vie privée).

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(1) “Poursuivi en justice pour avoir filmé Nancy avec un drone”, article publié le 13 février 2014 dans le Figaro (http://etudiant.lefigaro.fr)

(2) Voir à ce sujet le rapport de Roland Courteau “Sur les perspectives d'évolution de l'aviation civile à l'horizon 2040 : préserver l'avance de la France et de l’Europe”, rapport n°658 (2012-2013), déposé au Sénat le 12 juin 2013 (http://www.senat.fr/rap/r12-658/r12-65811.html#toc134)

(3) Arrêté du 11 avril 2012 relatif à l’utilisation de l’espace aérien par les aéronefs qui circulent sans personne à bord ; Arrêté du 11 avril 2012 relatif à la conception des aéronefs civils qui circulent sans aucune personne à bord, aux conditions de leur emploi et sur les capacités requises des personnes qui les utilisent ; Articles R.133-1-2 et D.131-1 à D.133-10 du Code de l’aviation civile.

(4) Loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, modifiée.

(5) Actualités CNIL “Usages des drones et protection des données personnelles” et “Drones : quelle vision prospective, quels enjeu pour les libertés ?” des 30 oct. 2012 et 6 déc. 2013.

(6) Communiqué de la Commission européenne du 19 juin 2013 intitulé “Les drones stimulent l’Innovation et créent des emplois”.



Bénédicte DELEPORTE
Betty SFEZ
Avocats

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Février 2014