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mardi 25 février 2025

Bilan des sanctions prononcées par la CNIL en 2024

 


Ce qu’il faut retenir


Dans son bilan de l’année 2024, la CNIL souligne la forte augmentation des sanctions et autres mesures correctrices prononcées pour non-conformité au RGPD.

 

Lire la suite de l'article : https://www.deleporte-wentz-avocat.com/actualite-bilan-des-sanctions-prononcees-par-la-cnil-en-2024

mardi 21 janvier 2025

Orange condamnée à 50M € pour prospection commerciale en l’absence de consentement de ses abonnés

 


Ce qu’il faut retenir

Le consentement de l’utilisateur est au coeur de la protection des données. C’est au nom de ce principe que la CNIL a condamné Orange à une amende de 50 millions d’euros pour avoir envoyé des messages publicitaires à ses abonnés sans leur consentement.

 

 Lire la suite de l'article : https://www.deleporte-wentz-avocat.com/actualite-orange-condamnee-a-50m-pour-prospection-commerciale-en-l-absence-de-consentement-de-ses-abonnes

mercredi 4 septembre 2024

Non-désignation d’un DPO : une commune sanctionnée par la CNIL

 

 

Ce qu’il faut retenir

Le RGPD s’applique aux organismes publics, comme aux organismes privés. Les collectivités locales par exemple, ont notamment l’obligation de désigner un DPO. Après avoir prononcé une série de mises en demeure en avril 2022 à l’encontre de 22 communes qui ne s’étaient pas mises en conformité, la CNIL a sanctionné la commune de Kourou à deux reprises pour ne pas avoir désigné de DPO.

 

Lire la suite de l'article : https://www.deleporte-wentz-avocat.com/actualite-non-designation-d-un-dpo-une-commune-sanctionnee-par-la-cnil

vendredi 12 avril 2024

Prospection commerciale : la CNIL confirme sa position en matière de collecte de données et de réutilisation de fichiers de prospects

 


Ce qu’il faut retenir

Après les amendes prononcées en 2022 et 2023 à l’encontre de responsables de traitement, la CNIL affirme sa jurisprudence en matière de constitution et d’utilisation de fichiers de prospects par les “data brokers” et les annonceurs. Deux nouvelles amendes ont été prononcées à l’encontre d’un courtier en données et d’un annonceur, mettant l’accent sur la validité du consentement et sur la responsabilité des sociétés réutilisatrices des bases de données.

 

Lire la suite de l'articlehttps://www.deleporte-wentz-avocat.com/actualite-prospection-commerciale-la-cnil-confirme-sa-position-en-matiere-de-collecte-de-donnees-et-de-reutilisation-de-fichiers-de-prospects

lundi 23 mai 2022

Les cookie walls validés sous conditions par la CNIL

 

Les règles d’utilisation des cookies doivent être mises à jour par le futur règlement e-privacy, qui n’est toujours pas adopté à ce jour. (1) Toutefois, l’utilisation des cookies est également régie par le RGPD, notamment en ce qui concerne les règles relatives au consentement des internautes.

Suite à l’entrée en application du RGPD, qui a notamment renforcé l’obligation de recueil du consentement des internautes par les responsables du traitement, de nombreux sites web ont mis en place des “cookie walls” (ou “murs de traceurs”) afin d’assurer la perception de revenus publicitaires. L’accès à ces sites est ainsi subordonné soit à l’acceptation des cookies par l’internaute (notamment des cookies de ciblage publicitaire), soit à un paiement ponctuel ou via un abonnement en cas de refus des cookies par l’internaute.

Le 4 juillet 2019, la CNIL a publié des lignes directrices relatives aux cookies et autres traceurs. Ces lignes directrices invalidaient les cookie walls, en précisant notamment que l’accès à un site internet ne pouvait jamais être subordonné à l’acceptation des cookies. Par la suite, le Conseil d’Etat dans sa décision du 19 juin 2020, a partiellement invalidé les lignes directrices de la CNIL concernant l’interdiction des cookie walls. (2)

Dans une recommandation du 16 mai 2022, la CNIL vient de préciser les conditions de validité des cookie walls. (3)


1. L’existence d’alternatives réelles et satisfaisantes

Dans sa recommandation du 16 mai 2022, la CNIL propose des critères d’évaluation pour apprécier la légalité des cookie walls. Comme précisé par le Conseil d’Etat dans sa décision du 19 juin 2020, ces critères doivent prendre en compte l’existence d’alternatives réelles et satisfaisantes en cas de refus des cookies par l’internaute.

Ainsi, l’éditeur qui met en place un cookie wall doit s’assurer que l’internaute qui refuse les cookies dispose d’une d’alternative réelle et équitable, soit pour accéder au site, soit parce qu’il existe un autre site, facile d’accès et sans cookie wall, proposant un contenu similaire.

L’alternative serait inexistante en cas d’exclusivité de l’éditeur sur les contenus ou services proposés, ou lorsqu’il n’y a pas ou peu d’alternatives au service.


2. Le caractère raisonnable de l’accès payant

Quant au prix à payer pour accéder au contenu en cas de refus des cookies, cette contrepartie payante (ou “pay wall”) est soumise à l’évaluation du caractère raisonnable du tarif imposé à l’internaute. Le caractère “raisonnable” du tarif, qui n’est pas fixé par la CNIL, doit être justifié par l’éditeur du site.

La CNIL précise par ailleurs qu’en principe, aucun cookie ne doit être déposé en cas d’accès payant, hormis ceux nécessaires au fonctionnement du site et ceux qui pourraient être imposés pour accéder à un contenu ou service tiers (par exemple, vidéo hébergée sur un site tiers ou boutons de partage sur les réseaux sociaux).

L’analyse de l’existence d’alternatives réelles et du caractère raisonnable du tarif de l’accès au site est réalisée au cas par cas.


    La collecte de données personnelles via un cookie wall, impliquant l’acceptation des cookies ou un accès payant au site web, doit en tout état de cause être conforme aux exigences fixées par le RGPD : recueil du consentement de l’internaute, transparence quant aux données collectées et à la finalité (ou aux finalités) du traitement, minimisation des données collectées par le responsable du traitement.

* * * * * * * * * * *

(1) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant le respect de la vie privée et la protection des données à caractère personnel dans les communications électroniques et abrogeant la directive 2002/58/CE (règlement «vie privée et communications électroniques»)

(2) Conseil d’Etat, décision du 19 juin 2020 sur les lignes directrices relatives aux cookies et autres traceurs

(3) “Cookie walls : la CNIL publie des premiers critères d’évaluation”



Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Mai 2022

mardi 24 novembre 2020

Données numériques post-mortem : comment gérer les données d’un proche décédé ?

 


La plupart d’entre nous avons créé et utilisons plusieurs comptes en ligne, que ce soit à des fins personnelles ou professionnelles, sans oublier la messagerie électronique… Toutefois, lors du décès du titulaire de comptes en ligne se pose la question de la gestion de ses données. En effet, la mort physique n’entraîne pas automatiquement la mort numérique et les comptes personnels, même inactifs, peuvent rester en ligne pendant des période plus ou moins longues. La question de la gestion des données numériques d’une personne décédée est essentielle lorsque l’on sait que chaque jour, 8.000 personnes en moyenne, inscrites sur Facebook, décèdent dans le monde. (1)


1. Les données personnelles numériques sont, par définition, personnelles

Les données à caractère personnel sont définies comme toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable, c’est-à-dire la personne concernée. Toute autre personne, y compris ses héritiers, est dès lors considérée comme un tiers. (2)

Les droits de la personne concernée (notamment les droits d’accès, de rectification et de suppression des données) sont attachés à cette personne et ne peuvent être exercés que par elle. Ce principe a ainsi été rappelé par les juges du Conseil d’Etat par deux arrêts en 2011 et 2017. (3) Les comptes de messagerie électronique sont, eux, couverts par le secret des correspondances.

Les droits de la personne concernée s’éteignent à son décès. Les tiers, héritiers et proches du défunt, n’ont donc pas automatiquement accès à ses comptes ouverts sur les plateformes et réseaux sociaux.

Que deviennent alors ses données numériques, ses comptes ouverts sur Facebook, Instagram, Twitter, LinkedIn, YouTube, ses comptes de messagerie ?

Jusqu’à l’entrée en vigueur de la Loi pour une république numérique, (4) les ayants droit d’une personne décédée ne pouvaient avoir accès à ses données numériques que dans des cas limités, aux fins d’exercer leurs droits en qualité d’héritiers (accès aux données de comptes bancaires par exemple).

De nombreux sites web, plateformes et réseaux sociaux clôturent automatiquement les comptes inactifs au bout d’une certaine période (1 an, 2 ans, voire plus). Cependant, les exploitants des sites n’ont pas connaissance du décès de leurs utilisateurs et ne peuvent intervenir pour supprimer leurs comptes à leur décès. D’autres plateformes n’ont pas de procédure particulière pour les comptes inactifs. Il existe donc de nombreux comptes inactifs pour cause de décès de leurs titulaires qui restent en ligne, la mort physique n’entraînant pas automatiquement la mort numérique.


2. Les conditions de la mise à jour des données numériques après la mort d’un proche

La Loi pour une république numérique a prévu une procédure assez complète aux fins de gérer la mort numérique d’un proche, en respectant le “testament numérique” du défunt. Ces dispositions figurent désormais à l’article 85 de la loi Informatique et Libertés, modifiée.

Deux options peuvent se présenter : soit la personne a défini des directives relatives à ses données personnelles après son décès, soit elle n’a pas prévu de directives.

    a) La personne a défini des directives relatives à ses données personnelles après son décès

Les directives définissent les conditions d’accès et de traitement de ses données personnelles après son décès. La personne concernée peut modifier ou révoquer ses directives à tout moment, au même titre qu’un testament.

Au cas où la personne concernée a défini des directives relatives à ses données personnelles après son décès, celles-ci peuvent être générales ou particulières.

Les directives générales portent sur l’ensemble des données personnelles de la personne concernée. Elles peuvent désigner la personne qui sera chargée de leur exécution. A défaut de désignation d’une personne spécifique, et sauf directive contraire, ses héritiers seront habilités à en prendre connaissance au décès de leur proche et à demander leur mise en oeuvre. Ces directives peuvent être enregistrées auprès d’un tiers de confiance numérique, certifié par la CNIL. L’existence de directives générales et le tiers de confiance sont inscrits dans un registre unique.

Les directives particulières portent sur les traitements de données identifiés dans ces directives, qui sont ensuite enregistrées auprès des responsables de traitement concernés, à savoir les plateformes et réseaux sociaux. A cette fin, les conditions d’utilisation des plateformes et/ou politiques de protection de la vie privée doivent mentionner cette possibilité. Toutefois, ce traitement doit faire l’objet d’un consentement spécifique, distinct de l’acceptation des conditions d’utilisation.

    b) La personne n’a pas prévu de directives relatives à ses données personnelles après son décès

Dans ce cas, ses héritiers ne peuvent exercer leurs droits qu’aux fins d’une part, d’organiser et de régler la succession du défunt en accédant aux informations utiles à la liquidation et au partage de la succession et d’autre part, de faire prendre en compte le décès par le responsable du traitement (clôture du compte utilisateur, mise à jour du compte, etc.).

Les principaux réseaux sociaux ont prévu des fonctionnalités de suppression de comptes inactifs suite au décès de leur titulaire (sauf mention contraire du défunt dans ses directives) ou de passage en mode “mémorial” (cf. Facebook) pour que les proches et amis puissent échanger et laisser des messages à sa mémoire. La CNIL publie sur son site une liste de réseaux sociaux ayant mis en place ce type de fonctionnalité, avec les liens vers les pages permettant de signaler le décès d’un proche.

En cas de désaccord entre les héritiers, ou si l’un d’eux estime notamment que l’utilisation des données personnelles d’une personne décédée porte atteinte à sa mémoire, sa réputation ou son honneur, ceux-ci peuvent saisir le tribunal judiciaire compétent.


* * * * * * * * * * *

(1) Source : CNIL “Mort numérique : peut-on demander l’effacement des informations d’une personne décédée ?”

(2) Voir définitions à l’article 4 du Règlement général pour la protection des données (RGPD)

(3) Arrêt CE du 29 juin 2011, req. n°339147 ; Arrêt CE du 7 juin 2017, req. n°399446

(4) Loi n°2016-1321 pour une république numérique du 7 octobre 2016



Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Novembre 2020

lundi 8 juin 2020

Covid-19 – La CNIL rappelle les conditions de collecte de données de santé par les employeurs


La CNIL a rappelé aux employeurs les règles applicables à la collecte de données de santé dans le contexte du déconfinement et du retour des salariés sur leurs lieux de travail, dans une communication du 7 mai dernier. (1)

Les données concernant la santé sont définies à l’article 4 du Règlement général sur la protection des données (RGPD) comme “les données à caractère personnel relatives à la santé physique ou mentale d'une personne physique, y compris la prestation de services de soins de santé, qui révèlent des informations sur l'état de santé de cette personne.

Les données de santé sont en principe interdites de traitement (art 9 RGPD), sauf dans le cadre des exceptions prévues au RGPD, et notamment lorsque le traitement est nécessaire aux fins de la médecine préventive ou de la médecine du travail, de l'appréciation de la capacité de travail du travailleur, de diagnostics médicaux, et sous réserve que ces données soient traitées par un professionnel de la santé soumis à l’obligation de secret professionnel. (2)

La collecte de données de santé des employés par les employeurs est donc interdite, car susceptible de porter une atteinte disproportionnée à la vie privée des personnes concernées. Les employeurs souhaitant mettre en place des procédures visant à s’assurer de l’état de santé de leurs employés à leur retour sur leur lieux de travail doivent se conformer au RGPD et au droit du travail. Il leur est conseillé de suivre les conseils des services de santé au travail (SST), particulièrement pendant la durée de la crise sanitaire. (3)

  • L’obligation de sécurité des employeurs

Les employeurs sont soumis à une obligation de sécurité de leurs employés (art. L.4121-1 et R.4422-1 code du travail). Ils doivent notamment mettre en œuvre des actions de prévention des risques professionnels, mais également informer et former les salariés. Enfin l’organisation et les conditions de travail doivent être adaptés. Ainsi, il leur est demandé de mettre à leur disposition du gel hydroalcoolique et des masques pour permettre de limiter les risques de contamination, mas également réaménager les postes de travail dans le respect des règles de distanciation sociale.

L’employeur peut rappeler à ses employés travaillant au contact d’autres personnes, de remonter toute information en cas de contamination éventuelle ou avérée, auprès de lui ou des autorités sanitaires compétentes pour adapter les conditions de travail, faciliter la transmission de ces informations par la mise en place de canaux dédiés et sécurisés, favoriser les modes de travail à distance et encourager le recours à la médecine du travail. En tout état de cause, il est recommandé aux employeurs d’informer les employés sur la mise en oeuvre de dispositifs ou de traitements liés à la santé pendant la période de crise sanitaire.

  • L’obligation de sécurité des employés

Les employés sont également soumis à une obligation de sécurité en matière de santé. En application de l’article L.4122-1 du code du travail, chaque employé doit veiller à préserver sa propre santé et sécurité, ainsi que celles des personnes avec qui il peut être en contact à l’occasion de son activité professionnelle.

Pendant la pandémie, tout employé en contact avec des tiers (collègues ou public) doit informer l’employeur en cas de contamination avérée ou éventuelle. Par contre, les employés en télétravail qui seraient contaminés ne sont pas tenus d’informer leur employeur. L’arrêt de travail n’aura pas à mentionner la cause.

Seules les données de date, d’identité de la personne, de contamination suspecte ou avérée, et de mesures organisationnelles prises peuvent être traitées par l’employeur. Par contre, l’identité de la/des personne(s) infectée(s) ne doit pas être communiquée aux autres employés.

  • Les différentes pratiques pendant la crise sanitaire

- Relevés de température des employés et clients à l’entrée des locaux : les employeurs ne peuvent constituer des fichiers conservant les données de température des salariés et clients. De même, il est interdit de déployer des outils de captation automatique de température. En revanche, l’utilisation d’un thermomètre manuel (type infrarouge sans contact), sans conservation des résultats, ni autre traitement, est autorisée.

- Tests sérologiques et questionnaires de santé : selon la Direction générale du travail, les campagnes de dépistage organisées par les entreprises pour leurs salariés ne sont pas autorisées. Seuls les personnels de santé compétents, soumis au secret médical, peuvent collecter ces données.

Les autorités sanitaires peuvent collecter des données de santé, dans les limites de leurs compétences, y compris “l’évaluation et la collecte des informations relatives aux symptômes du coronavirus et des informations sur les mouvements récents de certaines personnes.”


                                                                             * * * * * * * * * * *

(1) CNIL, « Coronavirus(Covid-19) : les rappels de la CNIL sur la collecte de données personnelles par les employeurs »

(2) Règlement 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD, et plus particulièrement les considérants 35, 52 à 54 et l’article 9

(3) Ordonnance n°2020-386 du 1er avril 2020 adaptant les conditions d'exercice des missions des services de santé au travail à l'urgence sanitaire et modifiant le régime des demandes préalables d'autorisation d'activité partielle


Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Juin 2020

vendredi 22 novembre 2019

Lignes directrices de la CNIL en matière de cookies : l’accent est mis sur le consentement de l’utilisateur



Le 4 juillet dernier, la CNIL a adopté de nouvelles lignes directrices relatives aux cookies, et autres traceurs. (1) L’objet de ces lignes directrices, qui abrogent la recommandation du 5 décembre 2013, est de donner un cadre réglementaire à l’utilisation des cookies, conforme au Règlement général sur la protection des données (RGPD), entré en application le 25 mai 2018, à l’article 82 de la loi Informatique et Libertés modifiée, et à la directive Vie privée et communications électroniques de 2002 (directive e-privacy). Les opérateurs restent en effet dans l’attente d’un nouveau règlement e-privacy. Annoncé pour entrer en application à la même date que le RGPD, ce règlement fait l’objet d’âpres débats au niveau communautaire et n’entrera pas en application à court terme. 
 

1. Un périmètre d’application très large

Pour rappel, un cookie est un petit fichier texte, enregistré par le navigateur de l’utilisateur (Google Chrome, Firefox, Safari) sur un ordinateur ou autre dispositif connecté à internet, lorsque l’utilisateur visite un site web.

Les cookies sont utilisés pour des finalités très diverses, telles que l’enregistrement des identifiants de l’utilisateur pour le reconnaître et le connecter automatiquement lors d’une prochaine visite sur le site, l’affichage de publicités ciblées, l’enregistrement du nombre d’affichage d’une publicité ou l’enregistrement des informations pour un service de web analytique par exemple.

La durée de vie d’un cookie est différente suivant sa finalité. Certains cookies disparaissent dès la fin de la session ou de la fermeture du navigateur, d’autres cookies peuvent être conservés pendant plusieurs mois, s’ils n’ont pas été supprimés par l’utilisateur.

Les « lignes directrices cookies » de la CNIL sont d’application très large puisqu’elles s’appliquent à tous types d’opérations impliquant l’utilisation de cookies et autres traceurs (cookies sur tous dispositifs tels que smartphones, tablettes, ordinateurs, et autres objets connectés à internet (consoles de jeux, télévision, véhicule, assistant vocal).


2. La notion renforcée de consentement, conséquence de la mise en conformité au RGPD

Le RGPD, en renforçant les droits des utilisateurs, a renforcé la notion de consentement. La simple poursuite de la navigation sur un site ne peut plus être considérée comme l’expression valide du consentement de l’utilisateur au dépôt de cookies.

Le consentement de l’utilisateur doit être recueilli conformément aux dispositions du RGPD.

Celui-ci doit être manifesté de manière

-       libre : possibilité de donner ou retirer son consentement à tout moment, et de visiter un site web même en cas de refus des cookies. Le blocage au site en cas de refus des cookies  (« cookie walls ») n’est pas conforme au RGPD ;

-       spécifique : le consentement doit être donné de façon indépendante et spécifique pour chaque finalité distincte. L’acceptation des CGU ne vaut pas recueil du consentement pour les cookies ;

-       éclairée :l’utilisateur doit être informé dans des termes simples et compréhensibles pour tous. Le renvoi vers les CGU n’est pas suffisant ; et

-       univoque : le consentement doit se manifester par une action positive de l’utilisateur, préalablement informé.

En pratique, on s’éloigne donc de la pratique du consentement passif par la simple poursuite de la navigation sur un site web, et de la pratique binaire de l’opt-in (case à cocher)/opt-out (case pré-cochée). Désormais, le consentement doit être donné de manière informée et positive, en cochant une case.

On notera que certains types de cookies bénéficient d’une exemption au recueil du consentement, à savoir notamment, les opérations ayant pour finalité exclusive de permettre ou faciliter la communication par voie électronique, ou qui sont strictement nécessaires à la fourniture d’un service de communication en ligne, à la demande expresse de l’utilisateur.


3. La responsabilité des éditeurs de sites web et autres opérateurs

Les acteurs utilisant des cookies et traceurs concernant des données à caractère personnel sont tenus de se mettre en conformité avec le RGPD et les « lignes directrices cookies ». Il peut s’agir d’un seul opérateur (éditeur d’un site web), de plusieurs opérateurs (éditeur de site et régie publicitaire) ou d’opérateurs tiers. Il conviendra donc d’analyser le rôle de ces différents opérateurs afin de déterminer s’ils interviennent en qualité de responsable de traitement uniques, conjoints, sous-traitants, ou encore responsables indépendamment de l’éditeur du site.

Par ailleurs, les opérateurs qui exploitent des cookies et traceurs devront être en mesure de prouver le recueil du consentement des utilisateurs, conformément à l’article 7 du RGPD.

Ces « lignes directrices cookies » seront complétées par une nouvelle recommandation de la CNIL précisant les modalités pratiques du recueil du consentement, devant être publiée au premier trimestre 2020. Les opérateurs disposeront alors d’une période de six mois pour se mettre en conformité avec ces lignes directrices.



Les règles édictées par les « lignes directrices cookies » de la CNIL viennent d’être en partie confirmées par un arrêt de la CJUE du 1er octobre 2019 dans lequel les juges communautaires ont considéré d’une part qu’en matière de consentement sur le stockage de cookies, une case pré-cochées ne constituait pas un consentement valable, d’autre part, que l’opérateur est tenu de donner des informations claires sur la durée des cookies et l’accès par des tiers. (2)


* * * * * * * * * *

(1) Délibération n°2019-093 du 4 juillet 2019 portant adoption de lignes directrices relatives à l’application de l’article 82 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée aux opérations de lecture ou écriture dans le terminal d’un utilisateur (notamment aux cookies et autres traceurs)

(2) CJUE, grande chambre, 1er octobre 2019, Bundesverband des Verbraucherzentralen und Verbraucherverbände contre Planet49 GmbH, aff. C-673/17

Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Novembre 2019


vendredi 2 août 2019

Non-conformité et infractions au RGPD - quelles sont les actions répressives de la CNIL


Avec l’entrée en application du règlement général sur la protection des données (RGPD) le 25 mai 2018, le montant des sanctions pouvant être prononcées par les autorités de contrôle (dont la CNIL) a été décuplé. De 150.000 à 3 millions d’euros au maximum avec la loi Informatique et Libertés - version pré-RGPD, le montant des amendes administratives peut désormais atteindre 20 millions d’euros ou 4% du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise. Cependant, un an après l’entrée en application du RGPD, 30% des entreprises européennes ne seraient toujours pas en conformité avec le règlement. (1)

La mise en conformité au RGPD est cependant une procédure souvent lourde et coûteuse pour les organismes. Elle implique la revue des process internes, depuis le développement des nouveaux produits ou services (application du principe de “privacy by design” et le cas échéant réalisation d’une analyse d’impact ou PIA), à la révision des produits et services existant et la création de documents de suivi de conformité (registre des traitements notamment).

Les risques de non-conformité à la réglementation sur la protection des données sont nombreux et les sanctions alourdies. L’action répressive de la CNIL comprend toutefois plusieurs étapes avant la prononciation éventuelle d’une sanction pécuniaire.


1. Non-conformité et infractions à la règlementation sur la protection des données personnelles

La règlementation sur la protection des données personnelles s’est considérablement étoffée avec l’entrée en application du RGPD.

    1.1 Les exemples de non-conformité

Les organismes ont disposé de deux ans, entre la date de publication du RGPD le 27 avril 2016 et son entrée en application le 25 mai 2018, pour mettre leurs activités de traitement de données personnelles en conformité. Les autorités de contrôle ont par la suite décidé d’appliquer une approche pédagogique pendant la première année d’application du RGPD. Un an après, les organismes doivent désormais être en conformité.

La liste des cas de non-conformité au RGPD est longue. On peut citer, entre autre :
- le défaut d’information des personnes concernées,
- la collecte frauduleuse, déloyale ou illicite de données personnelles,
- le détournement de finalité,
- la poursuite d’un traitement en dépit de l’opposition de la personne concernée,
- la conservation des données pour une durée non limitée,
- la conservation illicite de données sensibles,
- la poursuite d’un traitement interdit,
- le traitement illicite du NIR,
- le défaut de sécurité,
- le défaut de notification à l’autorité de contrôle en cas de violation de données,
- ou le transfert non autorisé de données en dehors de l’Union européenne.

    1.2 Le montant des sanctions alourdi

Le montant des sanctions pouvant être prononcées a été significativement alourdi, passant de 150.000 euros à 3 millions d’euros en octobre 2016, avec l’entrée en vigueur de la loi pour une république numérique (2), puis à 10 millions d’euros ou 2% du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise ou 20 millions d’euros ou 4% du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise avec le RGPD. (3)

Cette évolution du montant des sanctions pécuniaires est le reflet des risques croissants qui pèsent sur les personnes en cas de traitements illicites de leurs données, facilités par les développements des technologies (collecte à l’insu des personnes, détournement de finalité, etc.).

Alors qu’avant le RGPD, les sanctions prononcées en France par la CNIL atteignaient rarement quelques dizaines de milliers d’euros, la première sanction pécuniaire prononcée par la formation restreinte de la CNIL en application du RGPD s’est élevée à 50 millions d’euros. Cette amende a été prononcée à l’encontre de la société Google en janvier 2019, pour manque de transparence, information insatisfaisante et absence de consentement valable pour la personnalisation de la publicité. (4) Plus récemment, la formation restreinte de la CNIL a condamné la société de gestion immobilière Sergic à 400.000€ d’amende pour atteinte à la sécurité des données et non respect des durées de conservation. (5) Enfin, la société Active Assurances vient d’être condamnée à une amende de 180.000€ pour atteinte à la sécurité des données de ses clients. (6)


2. L’action répressive de la CNIL

Les Etats-membres prennent toutes les mesures nécessaires pour la mise en oeuvre du respect du règlement. En cas de sanction, celle-ci doit être effective, proportionnée et dissuasive. (7)

L’action répressive de la CNIL est définie aux articles 20 et suivants de la loi Informatique et Libertés, modifiée. Celle-ci comprend trois étapes, que l’on peut synthétiser comme suit :

    1ère étape - Le signalement

La CNIL prend connaissance des potentiels manquements à la réglementation sur la protection des données par différents canaux d’information, à savoir :

    - Les plaintes reçues par la CNIL : toute personne, en qualité de consommateur, client, salarié, citoyen, etc. dont les données personnelles ont été collectées et ont fait l’objet d’un traitement, peut déposer une plainte à la CNIL, via le site de la Commission, en cas de violation du RGPD par un responsable de traitement (site e-commerce, banque, administration, association, etc.).

    - Les informations publiées dans la presse ou sur internet : les articles de presse ou posts sur les réseaux peuvent alerter la CNIL sur les pratiques de certaines sociétés ou sur des failles de sécurité par exemple.

    - L’auto-saisine par la CNIL : chaque année, la CNIL définit un programme de contrôles pour l’année en cours, avec des thèmes identifiés comme prioritaires. Par exemple, la CNIL a identifié le contrôle des relations entre les responsables de traitements et les sous-traitants (répartition des responsabilités) et les traitements de données de mineurs comme thèmes prioritaires de ses contrôles pour 2019. A ce titre, la CNIL peut ainsi effectuer des contrôle par auto-saisine sur des organismes mettant en oeuvre des traitements identifiés dans ses thèmes prioritaires.

    - La coopération entre les autorités de contrôle européennes : le RGPD prévoit une plus grande coordination entre les autorités de contrôle des Etats-membres. Par exemple, en cas de plainte de la part d’un ou plusieurs consommateurs ou salariés d’un pays à l’encontre d’une société présente dans plusieurs Etats membres, l’autorité de contrôle de ce pays peut désormais signaler ladite plainte à la CNIL si des consommateurs ou salariés sont concernés en France.

    2ème étape - Le contrôle

La procédure de contrôle peut se dérouler comme suit :
    - Le contrôle en ligne, si les manquements signalés sont visibles à distance ;
   - Le contrôle sur place, dans les locaux de l’organisme. Dans ce cas, le contrôleur demandera au responsable du traitement de contrôler les traitements de données mis en oeuvre. par l’organisme ;
    - La convocation, avec audition des personnes responsables des organismes concernés.

Ces trois procédures de contrôle font l’objet d’un procès-verbal identifiant les éléments contrôlés et les manquements éventuellement constatés.

    - Le contrôle sur pièces. Ce type de contrôle est réalisé suite à l’envoi de questions écrites et la demande de documents au responsable du traitement.

    3ème étape - Les suites du contrôle

Suite au contrôle effectué par les agents de la CNIL, deux issues sont possibles :
    - Le contrôle a donné lieu à pas ou peu d’observations. Le dossier est alors clôturé et l’organisme contrôlé reçoit la notification de ladite clôture.

    - Si des manquements sérieux à la règlementation sont avérés, deux cas de figure peuvent alors se présenter :
La présidente de la CNIL peut prononcer une mise en demeure. La mise en demeure peut être publique (par voie de communiqué), la publicité ayant un double effet - d’alerte et pédagogique, pour tout organisme qui serait dans une situation similaire. L’organisme en cause dispose alors d’un délai pour se mettre en conformité, auquel cas, le dossier est clôturé. (8)

Par exemple, le 25 septembre 2018, la présidente de la CNIL a mis en demeure cinq société des groupes Humanis et Malakoff-Médéric pour détournement de la finalité des traitements des assurés. Les sociétés s’étant mises en conformité (modification du système informatique, suppression des données acquises illégalement, formation interne à la protection des données personnelles), les procédures de mises en demeure ont été clôturées le 21 février 2019. (9)

Le 8 novembre 2018, la présidente de la CNIL a mis en demeure la société Vectaury pour absence de recueil du consentement des utilisateurs au traitement de leurs données de géolocalisation à des fins de ciblage publicitaire. Suite à cette mise en demeure, la société Vectaury s’étant mise en conformité (affichage d’une bannière informative lors de l’installation des applications mobiles pour recueillir le consentement des utilisateurs), la procédure de mise en demeure a été clôturée le 26 février 2019. (10)
 
La formation restreinte de la CNIL, exerçant une fonction juridictionnelle, peut prononcer une sanction si l’organisme ne se met pas en conformité suite à la mise en demeure de la présidente de la CNIL. La formation restreinte peut également prononcer directement une sanction contre l’organisme en cause, sans mise en demeure préalable. (11)

La sanction peut être de nature pécuniaire pour les manquements les plus graves (montants définis par le RGPD), ou non pécuniaire (rappel à l’ordre, injonction sous astreinte, etc.). Enfin, les sanctions peuvent être publiques (par voie de communiqué et par la publication de la résolution sur le site de la CNIL et sur Légifrance) ou non publiques.

Les sanctions prononcées par la CNIL peuvent faire l’objet d’un recours par l’organisme sanctionné devant le Conseil d’Etat dans un délai de deux mois.


                                                                * * * * * * * * * * *

(1) “RGPD : près d’un tiers des entreprises non conformes”, Le Monde Informatique, 26 juillet 2019

(2) Loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une république numérique, ancien article 47 al.2 de la loi Informatique et Libertés

(3) Art. 83.5 et 6 du RGPD

(4) Délibération de la formation restreinte n°SAN-2019-001 du 21 janvier 2019 prononçant une sanction pécuniaire à l’encontre de la société Google LLC

(5) Délibération de la formation restreinte n°SAN-2019-005 du 28 mai 2019 prononçant une sanction pécuniaire à l’encontre de la société Sergic

(6) Délibération de la formation restreinte n°SAN-2019-007 du 18 juillet 2019 prononçant une sanction pécuniaire à l’encontre de la société Active Assurances

(7) RGPD, art. 84 (1)

(8) Le délai pour se mettre en conformité est fixé par la présidente. Il varie généralement entre 6 et 12 mois - mais ce délai peut être beaucoup plus court en cas d’urgence par exemple

(9) (Communication de la CNIL sur la clôture des mises en demeure à l’encontre des sociétés des groupes Humanis et Malakoff-Médéric, Site de la CNIL)

(10) (Communication de la CNIL sur la clôture de la mise en demeure à l’encontre de la société Vectaury, Site de la CNIL)

(11) La formation restreinte de la CNIL est un collège spécifique composé de 6 membres. Elle est chargée de mener les procédures de non-conformité au RGPD et à la loi Informatique et Libertés et, le cas échéant, de prononcer des sanctions pécuniaires.



Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Août 2019

lundi 18 mars 2019

Transferts de données personnelles et Brexit : comment se préparer à une sortie de l’UE sans accord ?

Le rejet du plan de sortie de l’Union européenne par les parlementaires britanniques à deux reprises, les 15 janvier et 12 mars derniers, laisse planer la possibilité d’un Brexit sans accord le 29 mars 2019, et ce même en cas d’un report éventuel de quelques semaines. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne sans accord posera de multiples problèmes, dont celui des transferts de données personnelles entre l’UE (et l’Espace économique européen - EEE) et le Royaume-Uni. Les sociétés de services numériques, les établissements financiers et les multinationales sont particulièrement concernés.

Les sociétés britanniques et leurs co-contractants européens doivent donc être préparés en cas de sortie de l’UE sans accord (« hard Brexit » ou « no-deal Brexit »), afin de minimiser les conséquences d’une telle situation sur leurs activités.

Bien que le Royaume-Uni ait mis à jour sa réglementation sur la protection des données personnelles avec le Data Protection Act 2018,(1) entré en application en même temps que le RGPD le 25 mai 2018, un hard Brexit signifierait la fin de la libre circulation des données personnelles entre l’Union européenne et le Royaume-Uni. Le Royaume-Uni sera alors considéré comme un pays tiers à l’UE et à l’EEE, sans pouvoir bénéficier du statut de pays offrant un niveau de protection adéquat. Les sociétés concernées, responsables de traitement, cotraitants et sous-traitants, devront mettre en place des accords de même type que les entreprises à l’international.

Voyant la date butoir se rapprocher, le Comité européen de la protection des données (CEPD) et la CNIL ont publié, courant février, des conseils à l’attention des organismes concernés par les transferts de données entre l’Union européenne et le Royaume-Uni.(2)


1. La mise en place d’outils de transfert de données pour continuer à assurer un niveau de protection adéquat

Les transferts de données depuis un pays membre de l’Union européenne vers un pays extérieur à l’UE ne bénéficiant pas d’une décision d’adéquation sont soumis à l’exigence de “garanties appropriées et à la condition que les personnes concernées disposent de droits opposables et de voies de droit effectives”, définies par des documents contraignants pour les deux parties, responsable du traitement et destinataire des données. (art. 46 du RGPD)

Ces documents peuvent être :

    - Les clauses contractuelles types (CCT)
Les CCT sont des contrats types de transferts de données adoptés par la Commission européenne. Les CCT doivent être signées telles quelles, et ne peuvent être modifiées par les parties. Il existe deux types de CCT : les CCT entre responsable du traitement européen et responsable du traitement de pays tiers (co-responsables de traitements) et les CCT entre responsable du traitement européen et sous-traitant d’un pays tiers.(3)

    - Les contrats “ad hoc”
Les clauses contractuelles spécifiques, ou “ad hoc” sont des contrats de transferts de données négociés entre les parties. Ces contrats doivent cependant être préalablement autorisés par la CNIL, après avis du CEPD.

    - Les codes de conduite et les mécanismes de certification
Ces deux outils ont été créés avec le RGPD. Comme pour les contrats “ad hoc”, les codes de conduite et mécanismes de certification doivent avoir été préalablement autorisés par la CNIL, après avis du CEPD. Ces outils étant nouveaux, ils semblent peu appropriés pour gérer les transferts de données entre l’UE et le Royaume-Uni, alors que les délais de mise en conformité sont très serrés.

    - Les règles contraignantes d’entreprise (ou binding corporate rules - BCR)
Les BCR sont des politiques intra-groupe, mises en oeuvre au sein de groupes ou sociétés multinationales et applicables à toutes les sociétés du groupe dans le monde. (art. 47 du RGPD) L’adoption des BCR est soumise à une procédure d’approbation par la CNIL. Comme pour les codes de conduite, le délai de mise en place de BCR rend cet outil peu approprié en l’espèce.(4)

Ainsi, pour les entreprises concernées par des transferts de données personnelles vers le Royaume-Uni n’ayant pas de BCR (transferts au sein de sociétés d’un même groupe), l’outil le plus adapté, compte tenu de la situation, est le CCT, document “prêt-à-signer” permettant de se mettre en conformité dans des délais très courts.

En cas d’utilisation de services cloud par des sociétés situées dans l’Union européenne, il conviendra de se poser la question de la situation des data centers et prendre éventuellement les mesures appropriées de mise en conformité : rapatriement des données personnelles sur le continent ou signature de CCT avec le prestataire de services cloud.

Des décisions devront être prises très rapidement par les entreprises concernées pour minimiser les blocages de transferts de données entre le continent européen et le Royaume-Uni.


2. Les autres mesures de mise en conformité des sociétés britanniques et non-européennes

Les sociétés britanniques et non-européennes devront également se mettre en conformité avec le RGPD en cas de “hard Brexit”.

    - La désignation d’un représentant dans l’UE
En vertu des articles 3(2) et 27 du RGPD, les sociétés britanniques responsables de traitement ou sous-traitantes, qui traitent d’importants volumes de données de résidents européens, devront désigner un représentant situé dans l’un des Etats-membres, comme toute société non-européenne dans la même situation.

Quant aux sociétés non-européennes qui auraient désigné un représentant britannique, elles devront désigner un nouveau représentant situé dans l’un des Etats-membres pour se mettre en conformité.

    - La désignation d’une autorité chef de file dans l’UE
Enfin, les sociétés non-européennes qui auraient désigné l’autorité de contrôle britannique (ICO) comme autorité de contrôle chef de file devront rapidement désigner une nouvelle autorité de contrôle dans l’un des Etats-membres, conformément à l’article 56 du RGPD.


3. La situation des données en provenance du Royaume-Uni

Les transferts de données personnelles vers l’UE en provenance du Royaume-Uni ne seraient pas soumis à des procédures supplémentaires pour garantir les droits des personnes concernées. Ces données personnelles britanniques pourront être transférées librement vers l’Union européenne, sous réserve d’être ensuite traitées conformément à la réglementation applicable.


    En l’absence de mise en place des outils juridiques appropriés avant la date effective du Brexit, tout transfert de données depuis l’UE vers le Royaume-Uni deviendra illicite. Cette situation peut paraître paradoxale alors que le Royaume-Uni est pour l’instant soumis au RGPD et donc considéré comme offrant les garanties nécessaires pour la protection des données personnelles en provenance du continent.

La Commission devrait très probablement régulariser cette situation dans les mois qui viennent en prenant une décision d’adéquation pour le Royaume-Uni.

                                                                          * * * * * * * * * * * *


(1) https://ico.org.uk/for-organisations/data-protection-act-2018/
 
(2) Se préparer à un Brexit sans accord : quelles questions ? Quels conseils de la CNIL ? site de la CNIL

(3) https://www.cnil.fr/fr/les-clauses-contractuelles-types-de-la-commision-europeenne

(4) https://www.cnil.fr/fr/les-regles-dentreprise-contraignantes-bcr-binding-corporate-rules


Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Mars 2019

mardi 5 février 2019

La CNIL prononce une sanction record de 50 millions d’euros à l’encontre de Google


Le 21 janvier 2019, la formation restreinte de la CNIL a prononcé une sanction pour un montant de 50 millions d’euros, à l’encontre de la société Google LLC.(1) Cette délibération, la première rendue en application du RGPD, est particulièrement motivée quant aux règles de compétence de l’autorité de contrôle pour engager la procédure, et quant aux manquements constatés.

L’un des objectifs du RGPD est de donner aux personnes concernées plus de maîtrise sur leurs données personnelles, en renforçant les principes de transparence et de consentement éclairé, grâce à une information préalable claire et compréhensible.

En l’espèce, la décision de la CNIL sanctionne un manque de transparence de la part de Google et met en cause la validité du consentement obtenu à partir d’informations qui “ne sont pas toujours claires et compréhensibles”, ni aisément accessibles pour les utilisateurs.

Les 25 et 28 mai 2018, soit juste après l’entrée en application du RGPD, la CNIL a été saisie de deux plaintes collectives en vertu de l’article 80 du RGPD, déposées pour le compte de près de 10.000 personnes, par les associations None Of Your Business et La Quadrature du Net. Ces plaintes étaient motivées par le fait que Google traitait les données personnelles des utilisateurs de ses services, notamment à des fins de ciblage publicitaire, sans base juridique valable.

En septembre 2018, la CNIL a procédé à un contrôle en ligne pour vérifier la conformité à la loi Informatique et Libertés et au RGPD des traitements de données personnelles réalisés par Google. Pour ce faire, la Commission a analysé le parcours d’un utilisateur et les documents auxquels il peut avoir accès, en créant un compte Google au moment de la configuration de son téléphone mobile sous Android.


1. La compétence de la CNIL pour engager la procédure contre Google

Avant même d’aborder les manquements constatés par la formation restreinte de la CNIL(2), celle-ci justifie notamment sa compétence pour engager cette procédure contre la société Google.

La société Google contestait en effet la compétence de la CNIL, en soutenant que le siège européen de Google étant situé en République d’Irlande, l’autorité de protection des données irlandaise (Data Protection Commission) était compétente en qualité d’autorité chef de file.

La formation restreinte rappelle que la notion d’établissement principal suppose que l’établissement concerné dispose d’un “pouvoir de décision vis-à-vis des traitements de données à caractère personnel (…)”, et que ce pouvoir de décision comprend “l’exercice effectif et réel d’activité de gestion déterminant les décisions principales quant aux finalités et aux moyens du traitement.” Cette notion doit s’apprécier in concreto et ne peut reposer que sur la déclaration de l’entreprise en cause.

En l’espèce, Google ne démontre pas que sa filiale irlandaise disposait d’un pouvoir décisionnel sur les finalités et les moyens des traitements concernés. Le rôle de Google Ireland Limited se concentrait sur les activités commerciales et financières de Google en Europe. Par ailleurs, Google Ireland Limited n’était pas mentionnée dans les Règles de confidentialité de la société au 25 mai 2018 (date de l’entrée en application du RGPD), et n’avait pas désigné de délégué à la protection des données (DPO).

La formation restreinte en conclut que Google Ireland Limited ne peut être considérée comme l’établissement principal européen de Google LLC au sens de l’article 4 (16) du RGPD. Elle ne peut donc identifier une autorité chef de file. Après avoir consulté les autres autorités de contrôle européennes et pris en compte les lignes directrices publiées par le CEPD (3), la CNIL se déclare compétente pour engager cette procédure.


2. Les manquements constatés par la CNIL

Pour établir ses constatations, la formation restreinte a analysé le parcours d’un utilisateur et les documents contractuels auxquels il peut avoir accès, en créant un compte Google lors de la configuration de son téléphone mobile sous Android.

Deux séries de manquements au RGPD ont été constatés :

     1 - Un manquement aux obligations de transparence et d’information

Le RGPD repose sur les deux principes fondamentaux de transparence et d’information. La formation restreinte reprend les articles correspondants (art. 12 et 13 notamment) et les applique à la lettre à la procédure de création de compte sur Google.

Selon l’article 12 du RGPD, les informations fournies à la personne concernée doivent être concises, transparentes, compréhensibles, aisément accessibles, et rédigées en termes clairs et simples. L’article 13 prévoit que le responsable de traitement fournit les informations suivantes à la personne concernée au moment de la collecte des données, à savoir l’identité et les coordonnées du responsable du traitement, le cas échéant les coordonnées du DPO, les finalités du traitement ainsi que sa base juridique, les destinataires des données, le cas échéant, le fait que les données seront transférées vers un pays tiers, etc.

En l’espèce, les informations délivrées par Google aux utilisateurs ne sont pas suffisamment accessibles, claires et compréhensibles. Certaines informations obligatoires ne sont pas fournies aux utilisateurs : “des informations essentielles, telles que les finalités pour lesquelles les données sont traitées, la durée de conservation des données ou les catégories de données utilisées pour la personnalisation de la publicité, sont excessivement disséminées dans plusieurs documents, qui comportent des boutons et liens qu’il est nécessaire d’activer pour prendre connaissance d’informations complémentaires. L’information pertinente n’est accessible qu’après plusieurs étapes, impliquant parfois jusqu’à cinq ou six actions.

L’architecture générale de l’information, mise en place par Google, rend l’accès à certaines informations clés difficile. Ainsi, même si ces informations sont fournies par Google, elles sont difficiles à trouver car nécessitent de passer de page en page, par plusieurs clics, avant de les atteindre.

La formation restreinte conclut à un défaut global d’accessibilité des informations délivrées par la société.

La formation restreinte met ensuite l’accent sur le caractère “massif et intrusif” des traitements mis en oeuvre par Google. Elle rappelle que les données collectées par Google à travers ses différents services proviennent de sources très variées : données d’utilisation du téléphone portable (Android), de la messagerie Gmail, de la plateforme de vidéos YouTube, données de navigation sur internet avec les cookies Google Analytics déposés sur des sites tiers, données de géolocalisation…

Ces données relèvent de trois catégories : les données produites par la personne concernée (nom, mot de passe, adresse email, etc.), les données générées par son activité (adresse IP, identifiant uniques de l’utilisateur, données de réseaux mobiles et sans fil, géolocalisation, etc.), et les données dérivées à partir des données produites par la personne ou générées par son activité (ciblage publicitaire sur la base notamment des centres d’intérêt des utilisateurs, à partir de leur activité sur internet, ou recommandations personnalisées).

La formation restreinte considère que les finalités annoncées dans les différents documents sont “trop génériques au regard de la portée des traitements mis en oeuvre et de leurs conséquences.” La description des données collectées est imprécise et incomplète. Au vu de ces éléments, elle considère que l’utilisateur n’est pas à même de prendre la mesure des conséquences des principaux traitements sur sa vie privée.

Le manque de clarté et la difficulté des utilisateurs à “comprendre l’ampleur des traitements mis en place par Google”, considérés comme “particulièrement massifs et intrusifs” est en partie la conséquence du nombre de services proposés par Google, de la quantité de données collectées ainsi que leur nature.

     2 - Un manquement à l’obligation de disposer d’une base légale pour les traitements de personnalisation de la publicité

La deuxième série de manquements concerne la validité du consentement.

L’un des principes fondamentaux du droit de la protection des données repose sur la caractère licite du traitement, et particulièrement le consentement de l’utilisateur qui doit être libre, spécifique, éclairé et univoque, et recueilli par un acte positif clair (art. 4 (11) RGPD). Les conditions relatives au recueil et au retrait du consentement figurent à l’article 7 du RGPD.

A ce titre, la CNIL relève que le consentement de l’utilisateur n’est pas valablement recueilli car non suffisamment éclairé, dans la mesure où l’information, telle que l’information sur les traitements de personnalisation de la publicité, est disséminée dans plusieurs documents et parfois difficile à localiser.

La CNIL relève ensuite que le consentement n’est ni “spécifique” car il concerne plusieurs traitements alors que le RGPD implique un consentement distinct pour chaque traitement ou finalité, ni “univoque” dans la mesure où plusieurs cases sont pré-cochées par défaut alors qu’elles devraient être décochées.

La formation restreinte en conclut que le consentement des utilisateurs n’est pas valablement recueilli car il n’est pas donné par un acte positif et distinct pour chacun des traitements mis en oeuvre.


3. Les motivations justifiant le montant de la sanction

Enfin, la formation restreinte justifie le montant de cette sanction, fixé en application des nouvelles dispositions du RGPD (art. 83), compte tenu de la gravité des manquements constatés, du nombre d’utilisateurs, du nombre de services et du volume de données concernés, et du fait que ces manquements sont continus et non pas délimités dans le temps. La CNIL rappelle ainsi que “le renforcement des droits des personnes est l’un des axes majeurs du Règlement” et que “les personnes physiques devraient avoir le contrôle des données à caractère personnel les concernant.

Les manquements constatés permettent, selon la formation restreinte, de justifier une amende qui, en l’espèce, a été fixée à 4% du chiffre d’affaires de la société Google, soit 50 millions d’euros. Cette amende reste cependant très en deçà du plafond de 20% du chiffre d’affaires mondial de Google (110 milliards de dollars en 2017 pour sa maison-mère, Alphabet), prévu par le RGPD.

La société Google a annoncé sa décision de former un recours devant le Conseil d’Etat.


    L’objectif de remplacer la précédente directive d’octobre 1995 par un règlement est d’assurer une approche unifiée du droit de la protection des données personnelles dans l’Union européenne. A ce titre, la formation restreinte mentionne avoir consulté les autres autorités de contrôle et se réfère à plusieurs reprises dans sa délibération aux lignes directrices du CEPD. On peut donc s’attendre au développement d’une “jurisprudence” homogène des autorités de contrôle européennes.

Cette première sanction de la CNIL donne un aperçu de l’application effective du RGPD et comment la conformité à la nouvelle réglementation est appréhendée par l’autorité de contrôle, à savoir une interprétation stricte du règlement. La CNIL sanctionne ici une architecture de l’information trop complexe et peu instinctive pour l’utilisateur, ainsi que des textes souvent rédigés dans des termes peu clairs ou trop généraux.

La difficulté pour Google, comme pour toutes les plateformes proposant plusieurs services, sera de concilier les impératifs de concision, transparence et simplicité de l’information avec ceux de clarté et spécificité du consentement, afin d’être considérée conforme aux dispositions du RGPD, alors même que ces dispositions impliquent des documents contractuels plus longs car plus détaillés. Même si Google a choisi de former un recours contre la délibération de la CNIL, la société devra faire un réel effort de simplification et de transparence de l’information.

                                                                   * * * * * * * * * * *


(1) Délibération de la formation restreinte n°SAN-2019-001 du 21 janvier 2019 prononçant une sanction pécuniaire à l’encontre de la société Google LLC

(2) La formation restreinte de la CNIL est un collège spécifique composé de 6 membres. Elle est chargée de mener les procédures de non-conformité au RGPD et à la loi Informatique et Libertés et, le cas échéant, de prononcer des sanctions pécuniaires.

(3) Le comité européen à la protection des données (CEPD, ex-groupe de travail Article 29 ou G29) rassemble les autorités des 28 Etats-membres. Il a notamment pour mission de clarifier la mise en œuvre du RGPD en vue d’assurer une application uniforme du règlement. Ainsi, 19 lignes directrices ont été adoptées et 6 sont en cours d’élaboration par le CEPD.


Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Février 2019