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vendredi 27 janvier 2012

Quelles sont les règles applicables aux soldes sur internet ?

Les soldes d'hiver 2012 ont débuté le 11 janvier dernier et doivent prendre fin le 14 février à minuit. Aux termes d’une enquête FEVAD/CSA publiée le 9 janvier, plus de 22 millions de Français ont l’intention d’acheter en ligne à l’occasion des soldes d’hiver.(1)

Les soldes sur internet sont soumis aux mêmes règles que pour la vente en magasin. Les soldes étant propices à toutes sortes d’abus et de fraudes par des commerçants peu scrupuleux, ces opérations sont très encadrées afin d’éviter les dérives, depuis les périodes autorisées pour les opérations de soldes, en passant par la publicité des soldes, jusqu’aux règles applicables en matière de prix. 

Nous rappelons ci-après les obligations légales, incombant notamment aux e-commerçants, en matière de soldes et les sanctions encourues en cas de manquements à la réglementation.


1. Des périodes de soldes réglementées

Les soldes doivent avoir lieu durant les périodes définies par la loi pour l'année civile. Il existe deux types de soldes : les soldes saisonniers et les soldes complémentaires, ou soldes flottants.(2)

Les soldes saisonniers  -  Comme les commerçants traditionnels, les e-commerçants ont la possibilité d’organiser deux périodes de soldes par an, d'une durée de 5 semaines chacune.

Les périodes de solde saisonniers sont fixées par décret : les soldes d'hiver débutent le deuxième mercredi de janvier à 8 heures du matin et les soldes d'été débutent le dernier mercredi de juin à 8 heures du matin. (art. R.310-15-2 C. com.)

Toutefois, 18 départements (principalement frontaliers et DOM) ont la possibilité de démarrer les soldes à des périodes différentes afin de tenir compte d'une forte saisonnalité des ventes ou d'opérations commerciales menées dans des régions frontalières.

Les soldes complémentaires  -  Ces opérations commerciales, également appelées soldes flottants, sont autorisées pour une durée maximale de 2 semaines par an, consécutives ou non.

Les e-commerçants sont tenus de faire une déclaration préalable des périodes de soldes flottants auprès du Préfet du département du siège de l’entreprise, soit par lettre recommandée avec accusé de réception, soit par voie électronique sur le site de la DGCCRF. Cette déclaration doit être faite au moins un mois avant le début des soldes.(3)


2. Les produits et services concernés par les soldes

Opération de déstockage  -  Les produits proposés en solde sont uniquement les stocks invendus de produits neufs ; l'objet des soldes étant de pouvoir écouler ces marchandises. Le stock, se trouvant dans l'établissement commercial, ses réserves ou un dépôt, doit donc être préalablement constitué : les produits ne peuvent faire l'objet de réapprovisionnement, sous peine d’amende.

Les produits soldés doivent avoir été proposés à la vente en ligne et payés par le e-commerçant depuis au moins 1 mois avant le premier jour des soldes. L'objectif de cette mesure est d'interdire aux commerçants l'achat de produits spécifiques pour la période des soldes, et ainsi d'éviter que le consommateur ne soit trompé sur la réalité de la réduction de prix. (art. L.310-3-I C. com.)

Les prestations de services  -  La DGCCRF considère que le régime des soldes est également applicable à certains types de prestations de services. Selon l'Administration, seules les prestations de services revendues par un commerçant qui en a acquis de manière ferme et définitive une quantité déterminée non renouvelable auprès d'autre opérateur (par exemple, la vente de voyages ou de séjours à forfait), peuvent être soldées ; il n'en va pas de même pour les prestations fournies dans l'immédiat (tels que par exemple les services permettant aux internautes de créer leur site web, un magazines ou des albums photos à partir d’une plateforme fournissant modèles et maquettes-types).

Les conditions de garantie  -  Les produits vendus en période de soldes bénéficient des mêmes garanties que celles prévues pour les produits vendus hors soldes, notamment la garantie contre les vices cachés et autres garanties contractuelles qui seraient habituellement appliquées. Les limitations de garanties sur les produits soldés sont donc interdites. Les mentions du type “articles soldés ni repris, ni échangés” sont considérées comme abusives et ne dispensent pas les e-commerçants d'échanger ou de rembourser les produits présentant des vices cachés par exemple.

En outre, en matière de vente à distance, le consommateur continue à bénéficier du droit de rétractation (sauf exceptions prévues par la loi), même en période de soldes.


3. Produits soldés : les règles applicables en matière de publicité et de prix

L’usage du mot “solde”  -  L’utilisation du terme “soldes” est réglementée. Le terme solde(s) est interdit pour désigner toute activité, dénomination sociale, nom commercial ou enseigne qui ne se rapporte pas à une opération de soldes impliquant une réduction de prix. Dès lors, un e-commerçant ne peut utiliser le mot solde pour des opérations commerciales autre que les soldes telles que définies par la loi. (art. L.310-3-II C. com.)

Les mentions obligatoires  -  Toute publicité relative à une opération de soldes doit mentionner la date de début de l'opération et la nature des produits sur lesquels porte l'opération, si celle-ci ne concerne pas la totalité des produits vendus sur le site marchand. (art. R. 310-17 C. com.)

Les conditions de réductions de prix  -  Les réductions de prix en période de soldes sont soumises à certaines conditions, afin notamment d’éviter la fraude :

- Des réductions de prix effectives : les soldes sont des opérations commerciales comportant de réelles réductions de prix. Ainsi, le commerçant qui maintiendrait ses prix, ou qui augmenterait les prix quelques jours avant les soldes pour les ramener ensuite à leur ancien niveau s'exposerait à des sanctions.

- Des réductions claires : l'acheteur doit être informé des réductions de prix pratiquées et pouvoir clairement faire la distinction entre les produits soldés et non soldés.

Ainsi, le site marchand doit afficher : l'ancien prix (lequel devra apparaître barré), le nouveau prix et le taux de réduction pratiqué. Pour plus de clarté, une rubrique “spécial soldes” peut regrouper les produits soldés. Les publicités, en ligne et hors ligne, doivent préciser l'importance de la réduction de prix (en valeur absolue ou en pourcentage), les produits ou services concernés par les soldes et la période pendant laquelle les produits ou services sont proposés à prix réduit.(4)

- La revente à perte autorisée : la revente d'un produit à un prix inférieur à son prix d'achat, ou revente à perte, est généralement prohibée. Toutefois, cette pratique est exceptionnellement autorisée pendant la période des soldes. (art. L.442-2 et s. C. com.)

Les produits invendus à l’issue de la période des soldes  -  Une fois la période des soldes terminée, le commerçant a la possibilité de poursuivre la vente des produits soldés invendus. En revanche, il devra cesser toute publicité spécifique aux soldes concernant ces produits et ne pourra afficher qu'un seul prix.


4. Les sanctions applicables en cas de non-respect de la réglementation sur les soldes

Le rôle de la DGCCRF  -  Les agents de la DGCCRF disposent de pouvoirs d'enquête leur permettant d'accéder aux locaux des entreprises, de se faire communiquer tous documents professionnels et recueillir tous renseignements. Ces agents sont notamment compétents pour contrôler le respect des règles relatives à l'information des consommateurs sur les prix et les conditions de vente. (art. L.450-1 et s. du C. com.)

Les sanctions  -  Les manquements aux règles précitées sont punis d'amendes dont les montants varient selon l'infraction commise.

Ainsi, le fait d’organiser des soldes sur des produits détenus depuis moins d'un mois à la date de début de la période de soldes et/ou le fait d'utiliser le mot solde (ou ses dérivés) dans les cas où cette utilisation ne se rapporte pas à une opération de soldes telle que définie par la loi sont punis d'une amende de 15.000€ (75.000€ pour une personne morale). (art. L.310-5 C. com.)

Le fait de ne pas mentionner dans la publicité, la date de début de l'opération commerciale et la nature des produits ou services sur lesquels portent les soldes est puni d'une contravention de 5e classe, soit 1.500€ (7.500€ pour une personne morale). (art. R.310-19-3° C. com.)

Enfin, le fait d'utiliser le mot solde dans une publicité, hors période de soldes et sans autorisation, est passible de l'amende prévue pour la publicité trompeuse, si l'opération est susceptible d'induire  les consommateurs en erreur. Le montant de l'amende s'élève à 37.000€ et peut aller jusqu'à 50% du montant consacré à la publicité litigieuse. (art. L.121-15 C. conso.)


5. Réglementation des soldes et territorialité


Le problème de la réglementation française des soldes et de son application territoriale, notamment pour les périodes de soldes, se posait pour la vente en ligne lorsque les périodes différaient selon les départements d’établissement des lieux de vente. Les dates des soldes saisonniers étant désormais les mêmes sur tout le territoire français (sauf certains départements et DOM, soumis à des dates différentes, comme indiqué ci-dessus), ce problème ne se pose plus au niveau national. Les entreprises de e-commerce établies en France sont soumises à ces règles - périodes de soldes, règles relatives à la publicité des soldes, à la fixation des prix, etc. - de la même manière que les magasins “en dur”.

Cependant, le problème de la territorialité de la réglementation des soldes n’est pas entièrement résolu pour autant : non seulement les consommateurs peuvent acheter sur des sites de e-commerce établis à l’étranger, à des prix “soldés” à des périodes différentes de celles applicables sur le territoire français, mais les règles applicables en matière d’établissement des prix et de publicité peuvent ne pas être encadrées de manière aussi stricte qu’en France. De la même manière, rien n’empêche les consommateurs étrangers de profiter des périodes de soldes sur les sites établis en France (sauf le refus du e-commerçant de vendre à des acheteurs résidant à l’étranger).

Le “handicap” de la concurrence des sites étrangers non soumis aux mêmes règles doit cependant être mis en perspective avec les garanties offertes par les conditions de vente des sites français (voir ci-dessus), et les obligations de transparence en matière de prix, ces deux éléments devant rassurer le consommateur. Enfin, avec la transposition de la directive protection des consommateurs, applicable dans les états membres au plus tard en juin 2014, les règles généralement applicables au commerce en ligne au sein de l’Union européenne (notamment information du consommateur, obligations en matière de livraison, délai de rétractation, etc.) seront amenées à se rapprocher. Certes, la directive ne concerne pas les conditions applicables aux soldes en ligne, mais les droits et obligations applicables à la vente en ligne B-to-C seront désormais très proches dans les différents états membres de l’Union.(5)


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(1) Voir communiqué de presse du 9 janvier 2012 sur le site de la Fevad (www.fevad.com), à la rubrique > espace presse
(2) Les règles concernant les soldes sont définies aux articles L.310-3 et suivants et R.310-15 et suivants du Code de commerce.
(3) Voir art. R.310-15 C. com. ; la télé-déclaration peut être faite en ligne sur le site de la DGCCRF (http://telesoldes.dgccrf.bercy.gouv.fr/).
(4) Voir notamment les articles 1 et 2 de l'arrêté du 31 décembre 2008 relatif aux annonces de réduction de prix à l'égard du consommateur qui disposent que toute publicité relative à l'annonce de réduction de prix, lorsqu'elle est faite sur le lieu de vente (en l’occurrence, le site marchand), doit faire apparaître, outre le prix annoncé, le prix de référence, qui ne peut excéder le prix le plus bas effectivement pratiqué au cours des 30 derniers jours précédant le début de la période des soldes. L'annonceur peut également utiliser comme prix de référence le prix conseillé par le fabricant ou l'importateur du produit sous réserve que ce prix soit couramment pratiqué par les autres distributeurs.
(5) Directive 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs.


Bénédicte DELEPORTE – Avocat
Betty SFEZ – Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Janvier 2012

article publié sur le Journal du Net le 30 janvier 2012

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